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XIII

Ainsi toute la responsabilité du désastre de Vigo doit incomber devant l’histoire à la seule lâcheté des milices commandées par le prince de Barbançon. Château-Renault ne commit aucune faute, et la reine d’Espagne le reconnaît elle-même quand elle lui fait écrire : « Je me suis sentie très touchée de ce que l’on doit à votre bonne conduite sur l’heureuse arrivée de la flotte de la Nouvelle-Espagne, comme des sages précautions que vous aviez prises pour éviter le malheureux succès en ce port. Ne doutant pas le Roi, mon seigneur, également porté à vous favoriser en tout ce que votre zèle vous a fait faire, vous pouvez être assuré que vous trouverez toujours le Roi également porté à vous favoriser en tout ce qui sera de votre convenance et que j’y contribuerai comme j’espère, de manière à vous en faire voir les effets. » La reine le reconnaît plus encore en ajoutant de sa main : « Je suis bien aise de vous assurer moi-même du désir que j’ai de vous témoigner, dans toutes les occasions qui s’en présenteront, la considération et l’estime que j’ai pour vous[1]. »

Les mêmes sentimens se retrouvent exprimés dans une lettre adressée par cette souveraine à Louis XIV :… « Je ne puis me consoler de la perte que vous avez faite de tous les vaisseaux qui étaient à Vigo pour le service de l’Espagne. Les Espagnols doivent être bien reconnaissans de toutes les choses que vous voulez bien faire pour eux ; mais ce que je peux bien vous assurer, c’est que personne ne le peut être autant que moi… Je plains la destinée du pauvre comte de Château-Renault de se voir dans un pareil malheur sans qu’il y ait de sa faute. Il n’y a rien qu’il n’imagine pour me rendre service, rassemblant des troupes pour défendre les passages et faisant d’ailleurs tout ce qu’un bon et zélé sujet de Votre Majesté peut faire pour le service du roi, votre petit-fils. Je voudrais que les Espagnols en eussent autant de reconnaissance que j’en ai[2]. »

Cette reconnaissance se traduisit aussitôt par un présent de 12 000 écus, que la reine d’Espagne envoya à l’amiral pour son

  1. La reine d’Espagne à Château-Renault, 15 novembre 1702. — Archives de la Marine.
  2. La reine d’Espagne au roi de France, 6 novembre 1702. — Archives des Affaires Étrangères.