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LE PROCÈS DE SORCELLERIE
DU
MARÉCHAL DE LUXEMBOURG[1]
(1680)

I
L’ARRESTATION

Dans la soirée du mercredi 24 janvier 1680, une nouvelle extraordinaire éclatait brusquement à Paris et à Saint-Germain, plongeant dans la stupeur bourgeois et gens de Cour. Le maréchal de Luxembourg, le vainqueur de Woerden, de Valenciennes, de Saint-Denis, l’une des gloires de la France, le premier de ses capitaines depuis la mort de Turenne et la retraite du grand Condé, venait d’entrer à la Bastille, inculpé d’actes infamans, menacé, disait-on, de la peine capitale. Rien ne préparait les esprits à cette chute foudroyante. La veille encore, le maréchal, capitaine des gardes du corps, exerçait tranquillement sa charge auprès du Roi, qui lui faisait « bonne mine, » ainsi qu’à l’ordinaire. Un échange de cadeaux avait même, ce jour-là, attesté leur parfait accord : le duc ayant cédé à Louis XIV un magnifique cheval de guerre, le souverain avait riposté par le don

  1. Sources principales : Archives du Château de Chantilly. — Archives du Ministère de la Guerre. — Archives de la Préfecture de Police. — Manuscrits de la Bibliothèque nationale, F. Clérambault : n° 1192. — Archives de la Bastille, publiées par M. Ravaisson. — Lettre secrète de M. De Luxembourg sur son emprisonnement à la Bastille. — Lettres des Feuquières. — Lettres de Sévigné, de Bussy-Rabutin, etc.