Page:Revue des Deux Mondes - 1903 - tome 16.djvu/291

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

voulaient empêcher l’unification nationale de l’Eglise germanique. Aussi la Bavière prit-elle prétexte d’une divergence d’idées avec la Prusse au sujet de la situation des protestans, pour faire échouer ! e projet d’article relatif à l’Église germanique. Wessenberg s’émut, puis s’indigna. Il conjura Metternich, lui déclara que ce serait une honte aux yeux du monde entier si le peuple allemand ne trouvait pas dans l’Acte de Vienne une garantie pour ses intérêts religieux ; que les gouvernemens unis pourraient intimider le Saint-Siège ; que Rome, au contraire, s’ils traitaient séparément avec elle, se jouerait d’eux. Metternich était de l’avis de Wessenberg ; mais, la Bavière tenant bon, l’on finit par effacer l’article litigieux : et le Congrès de Vienne se sépara sans donner à l’idée de primatie ou de patriarcat la plus légère satisfaction.

L’idée, pourtant, avait trop d’appuis politiques pour se résigner aussitôt à l’effacement ; elle continua de frapper à la porte des cabinets des souverains, et de courtiser les âmes des fidèles ; elle fut assez tenace, assez entreprenante, pour que certains esprits pussent croire, en Allemagne, à la prochaine fondation d’une « Eglise d’Utrecht, » à l’imminence d’un schisme germanique. Rome n’était point sans anxiété, lorsque se réunit à Francfort, en 1816, le Bundestag germanique : Metternich persistait dans son plan politique, Wessenberg dans son programme religieux, et leur communauté d’action était grosse de menaces. Mais l’appui de Metternich, qui avait, au Congrès de Vienne, été de quelque utilité pour Wessenberg, commença de lui être nuisible. La Prusse avait vu clair ; elle avait senti que la réorganisation de l’Eglise germanique, telle qu’on la désirait à Vienne, pouvait faire de cette Eglise la satellite de l’Autriche ; c’en était assez pour que la Prusse fît obstacle. Aussi les doctrines de Wessenberg, à Francfort, ne se heurtèrent-elles plus seulement à l’hostilité bavaroise, mais à l’antipathie prussienne : dès ce moment, elles étaient en recul.

La mort de Dalberg, en février 1817, leur donna le coup de grâce, en faisant disparaître le seul personnage qui eût été qualifié, sur l’heure, par son titre de prince-primat, pour supporter sur ses épaules la charge du patriarcat national. Il n’y avait plus de primat ; Wessenberg n’était plus qu’un ancien coadjuteur : il pouvait dès lors construire des théories sur la primatie, elles flottaient en l’air, indécises et vides.

Il se résolut à prendre la route de Rome, pour en revenir