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V

Point de contrat de travail particulier à la verrerie. Les parties s’engagent sous la loi, conformément au Code civil, titre du louage de services. On ne demande aux ouvriers adultes, avant de les embaucher, qu’un certificat de sortie de la dernière maison où ils ont travaillé. Aux enfans âgés de moins de dix-huit ans, filles et garçons, aux gamins, on réclame un livret et, selon le cas, le certificat d’études primaires ou un certificat d’aptitude physique. Et l’on fait bien d’être exigeant ; et l’on ne le sera jamais trop ; et peut-être y a-t-il des usines où l’on ne l’est pas assez : certaines confidences que j’ai reçues me laissent à cet égard des doutes qui sont des inquiétudes.

« Une seule chose est à regretter dans le travail des verriers, c’est l’âge trop précoce où les enfans commencent à servir les verriers comme gamins : le développement physique et intellectuel de ces enfans ne peut que souffrir de cette vie irrégulière, où parfois le jour est consacré au sommeil, tandis qu’il faut travailler de nuit. De certaines constitutions en sont altérées… On arrivera, je l’espère, à retarder de quelques années l’admission des enfans au travail des fours, et à régler ce travail de manière à ne souffler le verre que le jour, ce qui, d’ailleurs, sous bien des rapports, sera dans l’intérêt du maître de verrerie. Les lois sur le travail des enfans et sur l’instruction primaire, une plus grande sollicitude de l’autorité et des chefs de fabrique, ont déjà amené de grandes modifications à cet état de choses regrettable[1]. »

Ces lignes datent de trente-cinq ans : et, depuis trente-cinq ans, en effet, des précautions ont été prises. Mais elles ne peuvent empêcher que, comme il n’y a pas, dans la verrerie, de période d’apprentissage, en ce sens que les apprentis eux-mêmes gagnent tout de suite en entrant (40 francs par mois aux Verreries de Saint-Denis), les parens ne soient tentés de faire travailler et rapporter le plus tôt possible leurs enfans, avec d’autant moins de scrupule que c’est une vieille tradition, une vieille habitude du métier, par laquelle de bons juges ont expliqué le fait, à première vue surprenant, qu’il y eût tant d’illettrés parmi les enfans

  1. G. Bontemps, Guide du Verrier, p. 182.