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de La Haye crut devoir s’incliner devant l’autorité du jeune colonel, dont le talent fut admiré de tous, et la question du désarmement fut ainsi écartée pour longtemps du domaine des discussions diplomatiques.

Que si maintenant on demande qui pourrait soulever de nouveau cette question et préparer sa solution pratique, nous répondrons sans hésiter : les petits États neutralisés. Ils prêcheront la restriction des arméniens, non par des discours, mais par leur exemple. Ils prouveront que, par le développement illimité de toutes leurs forces productives, ils peuvent s’assurer un avenir sûr et enviable.

Le Danemark, en proclamant sa neutralité permanente, ne renoncera nullement, du reste, à son droit et à son devoir de défendre son existence par tous les moyens préventifs ou immédiats dont il dispose. Il commettrait un vrai suicide, s’il renonçait à défendre sa vie, son indépendance et son intégrité. Mais, en maintenant ses arméniens dans les limites de ce qui est strictement nécessaire pour sa propre défense, la nation danoise trouvera le moyen de sauver du gouffre ses forces productives, son argent et son crédit, qui sont aujourd’hui absorbés par la crainte continuelle de se voir attaqué ou engagé dans un conflit international. La neutralisation doit prévenir tous ces risques et, écarter la possibilité d’un grave conflit d’où qu’il vienne.

Mais, dès qu’un groupe assez important de petits États aurait été neutralisé, aussitôt la solidarité de leurs intérêts les forcerait à organiser leurs forces défensives militaires plus ou moins sur le même pied et d’après le même système. L’adage célèbre : « L’union fait la force, » pourra avoir, à un moment donné, une grande importance pratique. L’exemple de ces petits États neutres et pacifiques, qui pourraient se vouer tranquillement au développement de leurs forces économiques, physiques et intellectuelles, prêchera alors en faveur de la restriction des arméniens excessifs plus utilement que toutes les discussions diplomatiques.

Enfin, il nous reste à noter le rôle immense et bienfaisant que les États neutralisés pourront avoir dans le développement de l’arbitrage comme moyen juste et pratique de résoudre les conflits entre les nations. Pour ces États pacifiques par excellence, la Cour permanente d’arbitrage de La Haye deviendra naturellement la seule instance devant laquelle ils porteront leurs plaintes et réclamations. Supposons réalisée la neutralisation du