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extraordinaire prospérité ; mais, si la suppression des droits de douane a eu les plus heureuses conséquences pour l’ensemble du peuple britannique, elle n’en a pas moins entraîné la rapide décadence de l’agriculture. Tandis que la population et la richesse croissaient, et, avec elles, la demande d’alimens, les cultivateurs, ne pouvant résister à la concurrence des pays neufs, se faisaient de moins en moins nombreux, et produisaient de moins en moins. Les Iles Britanniques ont donc, en second lieu, besoin d’importer des alimens, et cela, en quantité énorme, tellement est grande l’insuffisance de leur production : en 1902, elles ont récolté 16 millions de quintaux de blé ; elles en ont importé 41 millions, plus 10 millions de quintaux de farine. Elles importent, de même, 13 millions de quintaux d’orge, 3 millions de quintaux de pommes de terre, 9 millions de quintaux de viande, bœuf, mouton ou porc, sans compter 420 000 bœufs et 300 000 moutons vivans, 1 300 000 quintaux de poisson, 2 millions de quintaux de beurre, 500 000 quintaux de margarine, 1 300 000 quintaux de fromage, 189 millions de douzaines d’œufs, une quantité de volailles. Et ce n’est pas seulement la nourriture des hommes, c’est celle des animaux qu’on achète à l’étranger : pour les chevaux, pour le bétail de qualité supérieure qu’élève encore l’Angleterre, il a été importé l’an dernier 8 millions de quintaux d’avoine, 22 millions de quintaux de maïs, et jusqu’à des fourrages, dont on ne croirait guère, à première vue, que la verte Angleterre et la plus verte Irlande pussent jamais manquer.

Riche et dépensant largement, le peuple anglais ne se borne pas à importer les alimens indispensables à sa subsistance. Il consomme beaucoup d’articles de luxe ou de demi-luxe, dont le climat humide et froid, le sol souvent médiocre des îles qu’il habite, lui rendent la production difficile ou insuffisante : fruits, légumes-primeurs, fleurs, vins, eaux-de-vie et liqueurs, thé, café, cacao, tabac. La valeur d’ensemble des articles alimentaires qu’il a importés en 1902 s’élève à près de 5 milliards et demi, dont plus des neuf dixièmes pour sa propre consommation.

Enfin, si puissante que soit l’industrie britannique, elle ne saurait fournir aux Anglais tous les articles manufacturés dont (ils ont besoin. La supériorité que donnent à la Grande-Bretagne

: Ses richesses minérales se manifeste surtout dans la grande industrie, celle qui emploie des machines et des forces motrices 

(très considérables ; or il est évident que cette grande industrie,