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UNE
ACADÉMIE DES BEAUX-ARTS
RÉVOLUTIONNAIRE
(1790-1795)

La plupart des artistes français de la Révolution, gagnés par le vertige de liberté qui emportait les esprits, résolurent d’affranchir leurs travaux de la tutelle académique. L’oppression d’un joug leur parut plus intolérable qu’ailleurs sur le domaine du génie et de la beauté : ils poursuivirent donc, avec opiniâtreté, la suppression de l’Académie royale de peinture. Mais, si le génie et la beauté se peuvent passer de lois, ils ne pouvaient, au gré de ceux qui croyaient les détenir, se passer d’encouragemens, d’appui, de récompenses. Où devait-on chercher de telles consécrations, sinon dans le suffrage des masses, infaillible arbitre du moment ?

C’était marcher à une tyrannie pire que celle dont on pensait avoir à se plaindre, et dont on se délivrait : les assemblées artistiques révolutionnaires en firent l’expérience jusqu’à leur fin logique, c’est-à-dire jusqu’au l’établissement, par leur vœu formel, de l’Académie qu’elles avaient tenté de remplacer ! Il y a là mieux qu’un épisode, d’ailleurs extrêmement intéressant, de notre histoire de l’art. Il y a une haute leçon de philosophie sociale : elle apparaîtra clairement dégagée des indications essentielles extraites des touffus procès-verbaux, demeurés inédits