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ses aptitudes si diverses, son intelligence si fertile, son esprit si clair et si noble, son goût pour la science, les lettres, son érudition, son ardeur soutenue par le plus mâle effort, la spontanéité de sa conception sereine et la promptitude de son exécution, il est unique, et, de toutes manières, il est un des plus grands spécimens de l’humanité. Il ne saurait se révéler tout d’un coup, et, quelque nombreux ouvrages qu’on ait écrits sur l’ensemble de sa vie et de ses productions, — et dont le plus complet, le mieux composé, le plus somptueux et le mieux présenté en France est celui de M. Emile Michel, — on ne dira jamais assez sa glorieuse existence, sur laquelle les recherches des érudits et des critiques nous valent encore d’importantes découvertes. Mieux que personne, l’éminent conservateur du Musée Plantin, M. Max Rooses, — qui, après la mort de M. Ruelens, a continué la Correspondance de Rubens et a écrit l’Histoire de l’Ecole de peinture d’Anvers, — a contribué à renouveler les études sur le chef de cette école en lui élevant un véritable monument dans son grand et inestimable ouvrage, l’Œuvre de Rubens[1], que M. Michel avait déjà fait connaître ici même, dont il s’était lui-même inspiré, et qui a servi, comme tous les autres travaux du même auteur, pour l’importante monographie aussi complète qu’érudite et informée, dont M, Louis Van Keymeulen nous donne aujourd’hui la traduction, du néerlandais en français, dans cette superbe édition, avec 280 gravures et 65 photogravures et autotypies hors texte.

Les portraits de Carmontelle[2] sont pour l’histoire des quarante dernières années de l’ancienne monarchie française des témoins d’une irrécusable valeur. Dans ce vaste recueil revit la seconde moitié du XVIIIe siècle, avec toutes ses élégances, et quelques-unes aussi de ses trivialités. La collection, composée de sept cent cinquante portraits de princes et seigneurs, de princesses et dames titrées, de ministres, de guerriers, magistrats, ecclésiastiques, savans et personnages illustres sous le règne de Louis XV, coloriés à la gouache d’après nature, fut achetée par son ami le chevalier Richard de Lédans, ancien officier retraité. Forcé de céder un certain nombre de ces portraits, il fit le catalogue des cinq cent trente dessins qui lui restaient. Après le décès de Lédans, en 1816, ils furent acquis par La Mésangére, puis, à la vente de La Mésangère, par les Duff Gordon Duff, et passèrent en Écosse, d’où ils sortirent en 1877 pour entrer à Chantilly, chez le Duc d’Aumale, qui les paya 112 599 francs, et y

  1. Ernest Flammarion.
  2. Plon.