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Mademoiselle concluait qu’il fallait absolument arrêter ce « pillage, » sans quoi « l’on ne ferait jamais 50 000 livres de bois par chacun an. »

Il signalait d’autres abus ; la nature des revenus seigneuriaux les rendait inévitables en l’absence d’une main ferme. J’ai sous les yeux plusieurs tableaux des revenus du comté d’Eu au XVIIe siècle. Les fraudes devaient être faciles et tentantes, la perception des impôts très coûteuse. On remarque d’abord une redevance, payable à Noël, en argent et en nature, par tous les habitans possesseurs d’un bien-fonds quelconque, maison ou « masure, » champ ou jardin : — François Guignon, du village de Gryel, « doit 40 sols, 2 chapons, à cause d’une maison audit Cryel. » — « François du Buc… doit 8 sols, un tiers de chapon, à cause d’une maison. »

« Guillaume Fumechon… doit 43 sols et 2 chapons à cause de demi-acre de terre. »

« Les hoirs Jean Drie doivent 8 sols et la moitié d’un chapon. »

« Jean Rose doit 31 sols, 2 poules et 11 œufs, à cause de ses terres aux champs. »

Le sieur de Saint-Igny, du Mesnil à Caux, « doit 4 livres, 9 sols, 10 boisseaux de bled et pareil nombre d’avoine. » Alizon « doit 3 sols, 6 deniers et un tiers de chapon. » Un cultivateur de Greny « doit une mine de bled, 15 boisseaux d’avoine et une poule ; » un autre « 2 boisseaux une quarte d’avoine et un quart d’oie ; » un autre « cinq quarts d’oie. » Ainsi de suite pendant trois cent cinquante pages in-folio.

L’impôt dit « du travers » frappait les marchandises entrant à Eu par « la porte de Picardie. » On payait tant par chariot ou cheval chargé. Les bouchers payaient « pour chacun bœuf, vache ou porc un denier, pour chacune blanche bête une obole, » les « poissonnières » « pour chacun panier à bras 2 deniers, » les « fourreurs pour chacune peau une obole. »

Venait ensuite l’impôt « de la friperie ou chincherie, pour lequel est dû de chacun lit qui se vend en la ville d’Eu, soit neuf ou vieux, 4 deniers ; et pour chaque robe, pourpoint, chausses ou autre chose à l’usage d’homme ou femme, quand ils sont vendus, un denier. »

Le marchand de toile devait également « un denier, sur peine d’amende, pour chaque coupe » vendue.