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la fabrication de l’artillerie nouvelle, de la population pour le recrutement des équipages.

Le budget de la marine avait été porté à 407 millions de francs pour 1889-90. Il fut de 545 millions pour 1896-97, de 595 millions pour 1898-99, de 665 millions pour 1899-1900, de 800 millions pour 1902-03, de 870 millions pour 1903-04. Il sera peut-être d’un milliard de francs pour 1904-1905. Quant à l’effectif du personnel, il était de 68 000 hommes, officiers, matelots et marines en 1890. Il s’éleva à 100 000 dans l’année du Diamond Jubilee et dépasse 130 000 hommes pour 1903-1904.

L’Angleterre cependant ne pouvait être pleinement rassurée lorsqu’elle considérait ce que possédaient en forces de valeur analogue, au même moment, les marines rivales de Francs, de Russie, d’Allemagne et des Etats-Unis, et plus encore en mesurant l’effort que se préparaient à faire, dans les années qui allaient suivre, ces quatre puissances, dont chacune aujourd’hui possède une force navale incomparablement supérieure à ce qu’était tout l’ensemble de l’établissement maritime de l’Angleterre en 1887. L’empereur d’Allemagne faisait des efforts inouïs pour inculquer à son peuple et à son Parlement la notion que les destinées de l’empire étaient désormais sur mer. Quant aux Etats-Unis, ils avaient pris, au moment de l’affaire du Venezuela (fin 1895), un ton assez menaçant pour que l’on dût en Angleterre avoir aussi les yeux fixés sur les dépenses maritimes votées au congrès de Washington. Non, assurément, il n’était pas permis aux chefs de l’Amirauté britannique de se reposer sur les lauriers de la revue de 1897 ! Les efforts de leurs prédécesseurs n’étaient rien à côté de ceux auxquels les condamnait cette forme nouvelle de la « lutte pour la vie » entre nations.


V

M. Goschen se trouva, dès le début de l’année 1898, aux prises avec ce redoutable problème. La France et la Russie, loin de s’arrêter dans la voie des armemens, s’engageaient dans l’exécution de nouveaux programmes de construction entraînant pour plusieurs années des dépenses considérables. En Allemagne, l’empereur et l’amiral Tirpitz, triomphant enfin des résistances du Reichstag, lui faisaient adopter un programme comportant la création en sept années d’une flotte nouvelle de 18 cuirassés