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âpre en ce pays qui, somme toute, ne produit pas beaucoup. Certes, depuis trente ans on y a trouvé de nouvelles sources de richesses ! On tire 8 millions de tonnes par an des mines de charbon, on a beaucoup développé celles de cuivre ; de grandes industries se sont créées : celle du coton, qui fait en Chine et en Corée une concurrence heureuse aux manufactures de l’Inde, de l’Europe et de l’Amérique ; celle des allumettes, qui inonde de ses produits tout le Pacifique et jusqu’à l’Océan Indien ; le tissage de la soie, la fabrication des nattes, la préparation du thé se sont beaucoup développés. Les salaires ont haussé : exprimés en monnaie du pays, de 1887 à 1902, ils ont plus que doublé, un journalier gagnait, en 1887, 16 sen ou centième de yen par jour ; en 1902, 39 sen. Il est vrai qu’en 1887 le sen valait près de 4 centimes, il n’en vaut plus que 2 et demi aujourd’hui, ce qui met à 1 franc environ au lieu de douze sous la journée de notre homme. Mais le prix de toutes choses a beaucoup augmenté aussi : le riz, l’orge, le daïzou, espèce de fève, c’est-à-dire les denrées qui sont le fond de l’alimentation japonaise ont à peu près doublé dans cet intervalle de quinze ans ; le saké, ou vin de riz, frappé d’impôts toujours croissans, a triplé ; le thé et le sucre n’ont guère augmenté que de moitié. Seules, les cotonnades, dont s’habille l’homme du peuple, ne sont guère plus chères qu’autrefois, grâce à l’introduction des métiers mécaniques. Ainsi le salaire réel, représenté par les marchandises que permet d’acheter le salaire nominal, a-t-il assez médiocrement augmenté, surtout dans les campagnes, et, si la vie est un peu plus large, il s’est créé aussi de nouveaux besoins. La population s’accroît maintenant de 500 000 âmes par an. À ce taux, le Japon qui avait 33 millions d’habitans en 1870 et