Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 20.djvu/420

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

varient, notamment, suivant l’importance du domaine de l’État. Si nous laissons de côté les autres recettes, et ne prenons que les impôts, directs et indirects, nous verrons que les Japonais paient aujourd’hui à l’Etat 430 millions de francs environ, 9 fr. 40 par tête, tandis que nous payons en France, d’après le budget de la même année 1903, quelque 2 milliards 560 millions, ou 67 francs ; nous retrouvons la même proportion de 1 à 7 que pour l’ensemble des budgets. De même, un Italien paie en moyenne 40 francs chaque année au gouvernement central, un Égyptien 20 francs, un Hindou 5 francs. Ici, la comparaison nous paraît nettement à l’avantage des Japonais, car nous ne saurions admettre que la richesse moyenne d’un habitant de l’Italie, où les salaires sont si modiques, soit quadruple de celle d’un sujet du Mikado, ni celle d’un Égyptien double, ni même qu’un Hindou possède la moitié des facultés contributives d’un Japonais. Les taxes départementales et municipales, qui s’élèvent à quelque 200 millions de francs par an, viennent augmenter la charge de ce dernier, mais non, semble-t-il, d’une manière démesurée.

D’ailleurs, si les impôts ont fort augmenté au Japon, s’ils ont presque triplé en dix ans pendant que la population ne s’accroissait que de 10 à 12 pour 100, la richesse a augmenté aussi, moins assurément que les impôts, mais plus que la population. Des industries nouvelles ont été introduites ou très développées ; le commerce extérieur a lui-même triplé, tant aux importations qu’aux exportations ; les recettes des chemins de fer ont quadruplé, bien que le réseau n’ait fait que doubler, ce qui fait à longueur égale une recette double ; les recettes des postes et télégraphes ont quadruplé aussi[1]. Or ce sont là les signes les plus certains du développement de la richesse publique. Il est naturel et salutaire, que le contribuable se plaigne quand les impôts augmentent, sans quoi le gouvernement ne résisterait pas à la tentation de le tondre de trop près ; mais le Japon n’est pas le pays où il y a le plus sujet de s’apitoyer sur son sort.

Enfin, si l’on remonte, non plus à une dizaine d’années en arrière, mais à l’ancien régime, on voit qu’au milieu du XIXe siècle, l’ensemble des redevances que percevaient soit les daïmios, soit le shogoun, était évalué, en nature, à 30 millions

  1. D’après l’Annuaire financier et économique du Japon.