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Cohnheim, un expérimentateur allemand qui a récemment découvert l’érepsine, agent digestif intestinal, Bayliss et Starling, physiologistes anglais qui ont fait connaître la sécrétine, et enfin un jeune savant français, C. Delezenne, qui a heureusement étendu les idées de Pavlow.


II

La digestion d’un repas est un phénomène étonnamment complexe auquel coopèrent un grand nombre d’organes, et qui comprend une multitude d’actes de nature diverse : nerveux, mécaniques, physiologiques, chimiques, régulièrement enchaînés entre eux. Parmi ces actes, les plus caractéristiques sont les actes chimiques. Aussi s’est-on habitué à leur accorder le premier rang. Le principal effort des expérimentateurs depuis une centaine d’années n’a cessé de s’exercer dans le dessein de les mieux connaître.

L’appareil digestif est surtout une usine chimique. C’est le mot qui revient constamment sous la plume des auteurs contemporains. Les anciens aussi savaient bien que les alimens Introduits dans l’estomac sont destinés à subir une dénaturation plus ou moins complète. Ils savaient qu’ils sont soumis à une élaboration plus ou moins profonde qui les rend aptes à être absorbés et utilisés pour la réparation de l’édifice vivant. Une dénaturation de ce genre est, par définition même, une opération chimique. Mais à une époque où la chimie n’existait pas, les anciens devaient lui chercher des analogues dans des faits de la vie journalière, et, par exemple, dans la cuisine qui est bien une chimie domestique. Pour Hippocrate, la digestion était une cuisson dans l’estomac qui était une marmite. Pour d’autres, Galien, Van Helmont, c’était une fermentation, et l’appareil digestif était une sorte de cuve de vendange. Certains, comme Plistonicus, et, plus tard. Cheselden, y voyaient une corruption, une putréfaction naturelle. Les Italiens de la Renaissance, comme Vallisnieri, en faisaient une altération comparable à celle qu’éprouve le cuivre sous l’action de l’eau-forte, toutes ces images sont des traductions plus ou moins exactes de la même idée, celle d’une transformation chimique, comme résultat principal ou but de la digestion.

A. la vérité, les alimens ne sont pas seulement soumis à des actions chimiques dénaturantes. Dès leur entrée même dans l’appareil digestif, ils sont exposés à des traitemens mécaniques, altération, broyage, brassage, et ces opérations avaient paru à certains savans, tels que