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M. Deloncle n’a pas fait sortir M. Combes de son mutisme. M. Deloncle est d’ailleurs un ami du ministère, un membre du bloc, un libre penseur, et il entend rester tout cela. Il approuve la suppression des congrégations en France ; mais le patriotisme l’éclairé mieux au dehors. Le mot qu’il a dit a été décisif : l’amendement Leygues a été voté à une dizaine de voix de majorité. Après le vote de celui de M. Caillaux, c’était pour le gouvernement un deuxième échec.

Mais, le lendemain, il a pris sa revanche, et c’est pour cela que nous ne savons plus quelle sera l’efficacité de l’amendement Leygues. M. Combes a émis la prétention de la faire dépendre de sa seule volonté. D’abord M. Charles Dumont a présenté une addition à l’amendement, en vertu de laquelle les élèves des noviciats devront avoir vingt et un ans accomplis. Comme c’est précisément à cet âge qu’ils feront leur service militaire, même si l’on admet que la durée en sera bientôt réduite à deux ans, leur entrée au noviciat sera reculée jusqu’à vingt-trois. L’addition de M. Dumont a évidemment pour objet, et elle aura très probablement pour effet, de rendre le recrutement des noviciats impossible. Sous prétexte d’éprouver les vocations religieuses, M. Dumont les détruit dans leur germe, car ces vocations, comme la plupart des autres, ont besoin d’être entretenues. Au surplus, les noviciats ont pour but de faire des professeurs : or, le professorat est une profession comme une autre, à laquelle il faut se préparer avec le moins de distractions et d’interruptions possible. Obliger de futurs maîtres d’école, qui seront le plus souvent des instituteurs primaires, à interrompre leurs premières études vers l’âge de quatorze ou quinze ans pour les reprendre à vingt-trois ou à vingt-quatre, et pour entrer alors dans une sorte d’école normale, est une pure absurdité On espère que, pendant ce long intervalle, le jeune homme qui avait du goût pour l’enseignement congréganiste à l’étranger ne manquera pas de le perdre et d’adopter une autre carrière, et cela, en effet, arrivera le plus souvent. Que penser d’une Chambre qui se prononce un jour pour l’amendement Leygues, parce qu’elle croit à l’utilité de l’enseignement congréganiste à l’étranger, et, le lendemain, adopte l’addition Dumont pour supprimer l’effet de son premier vote ?

M. Dumont a voulu empêcher les noviciats de trouver des élèves. M. Combes a fait mieux : il a expliqué que tous les noviciats qui existent aujourd’hui devraient d’abord être fermés avec les congrégations elles-mêmes, et qu’ils ne se rouvriraient ensuite que s’il leur en accordait l’autorisation. Il a affirmé que l’amendement de M. Leygues ne signifiait pas autre chose. Le principe de la loi, a-t-il dit, est dans