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trouvait, par bonheur, traduite dans une langue excellente, maintint au-dessus du dialecte vulgaire, fatalement voué à la corruption, une langue plus fidèle à son propre génie. Aux écoles du dimanche, instituées pour la connaissance des Écritures, le peuple illettré apprit à lire, rouvrant ainsi devant lui les voies de la vie intellectuelle, — au bout desquelles nous voyons se dresser, après un siècle et demi, l’institution rajeunie des eisteddfodau et l’Université de Galles.

L’eisteddfod est maintenant assez connue en France pour qu’il ne soit pas besoin d’en exposer l’histoire, ni d’en décrire l’appareil. On sait que cette assemblée, ou plus littéralement session, tombée en désuétude à partir du XVIIe siècle, à cause du discrédit de la langue et de l’éclipsé de la littérature galloise, reparut au XIXe avec un dessein élargi et transformé. Elle est devenue une occasion de discuter les questions sociales et économiques qui intéressent la Principauté, un centre de ralliement pour les Gallois qui s’y rencontrent de tous les coins du pays et même de toutes les parties du Royaume-Uni, une sorte de Parlement spirituel pour le Pays de Galles. L’eisteddfod de Cardiff, en 1898, rapprocha même les représentans des diverses communautés celtiques et prépara le grand Congrès de Dublin, qui se tint en 1900. L’eisteddfod nationale n’est, dans la pensée de ceux qui l’ont restaurée, qu’une des lignes d’un vaste plan. Des assemblées analogues se multiplient dans les provinces, formant ainsi comme une seconde organisation au-dessus des écoles du dimanche. Ces écoles elles-mêmes ont été l’ébauche d’un système réalisé aujourd’hui dans son ensemble, grâce à la loi de 1889, Intermediate Education (Wales) Act, qui organise l’enseignement secondaire et au vote de 1893, qui crée l’Université.

Pour épanouir cette suprême expression de sa vie intellectuelle, la nation galloise a favorisé de tout l’effort d’une volonté consciente le jeu naturel d’une loi. La réforme religieuse développait logiquement ses conséquences. Au nombreux clergé non-conformiste il fallait donner une instruction : ce besoin créa des collèges théologiques. Par contre-coup, l’Eglise établie se trouva amenée, pour pouvoir lutter avec ce jeune clergé et lui disputer l’influence, à fonder aussi des séminaires, où elle pourrait recruter un clergé gallois, connaissant le peuple et parlant sa langue. En 1827, le collège de Saint-David est fondé sous la haute main de l’Église d’Angleterre ; il ne tarde pas à être investi,