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que Pintoricchio peignit à la voûte du chœur de Sainte-Marie du Peuple, parmi les guirlandes et les arabesques d’or. Sous la Confession de Saint-Pierre, dans les grottes vaticanes, asile de tant de merveilles, on voit encore un saint Grégoire, sculpté par des mains florentines. Enfin, sur les degrés de l’autel, devant le Saint-Sacrement, objet de l’immortelle Dispute, le docteur et le pontife, ayant à ses pieds son livre des Moralia, siège sur le trône de marbre qu’on garde encore en son église du Cœlius et dont les bras s’achevaient en têtes de lion.

A la porte de la sacristie de Saint-Pierre, — et cette place ne messied pas à l’ordonnateur de la liturgie, — un autel, que rien ne distingue, recouvre les restes du grand Pape. Pendant les jours anniversaires, quelques cierges y brûlaient, fidèles, et, le matin de la grand’messe pontificale, sur la modeste tombe de celui qui bientôt allait être comme le patron ou le héros des cérémonies solennelles, je me souviens d’une humble messe basse qui sonnait doucement.

S’il est un lieu dans Rome où se respire encore, pour ainsi dire, l’âme de saint Grégoire, c’est le Cœlius. Ici fut sa maison natale ; son monastère, dédié à saint André, fut ici ; une église, élevée à leur place, porte son nom. Ici les envoyés du peuple vinrent le chercher et le saisir, pour l’élever par force sur le glorieux et redoutable faîte. On accède à l’église par la via San Gregorio, qui se détache du Colisée et passe d’abord sous l’Arc de Constantin. Ce n’est point une rue, car des maisons ne la bordent pas, mais plutôt, entre le Cœlius et le Palatin, une allée déjeune verdure. Elle est presque déserte, par cette belle et déjà chaude matinée d’avril. A peine si l’on y rencontre quelqu’une de ces charrettes, peintes de couleurs vives, qui apportent de la campagne à la ville le vin des Castelli. Le paysan qui la conduit a relevé sur sa tête, pour la défendre du soleil, une vieille capote arrondie en berceau. Nous sommes au temps de Pâques : les chevaux portent à leurs harnais des houppes de laine éclatantes ; le siège est garni de rameaux d’olivier, de pêcher, d’amandier, qui font au-dessus du dôme de toile une autre voûte de feuillage et de fleurs. Une prairie monte doucement au perron de la basilique. Transformée, hélas ! et déformée comme tant d’autres, elle n’a gardé que ses colonnes et son pavé de mosaïque. Mais, au fond, à droite, s’ouvre un petit oratoire dallé de marbre et voûté d’or. Voilà, taillé dans le marbre aussi, doré aussi par le temps, le siège du pontife ; la forme, la masse et l’aplomb de cette chaire primitive ont conservé quelque chose de la majesté romaine. A l’opposé, la muraille se creuse en une sorte d’alcôve étroite et grillée : « Ici, fatigué par les veilles et par un labeur incessant, Grégoire