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seconde édition de son Mémorial, retrancha seulement les phrases citées en italique.

Aimé Martin, qui s’occupait à écrire un ouvrage sur celui qui avait été son maître, devait critiquer violemment l’attitude de Didot Saint-Léger et blâmer des paroles qu’il jugeait mensongères. L’Essai sur la vie et les ouvrages de Bernardin de Saint-Pierre parut chez le libraire Méquignon-Marvis, en 1820. Didot-Saint-Léger s’y trouva si vivement pris à partie, qu’il n’hésita point à intenter à Aimé Martin un procès en diffamation : c’était en 1821[1].

Durant ce procès. Saint-Léger fit paraître une petite brochure anonyme, de vingt-trois pages, ayant pour titre : la Vérité, en réponse aux calomnies répandues dans un écrit intitulé : Essai sur la vie et les ouvrages de Bernardin de Saint-Pierre par L. A. Martin (Paris, 1821, imprimerie de Didot jeune, in-8o). Il reprenait, discutait, critiquait dans cette plaquette les divers passages de l’Essai qui lui paraissaient inexacts ou mensongers, et il terminait en prenant à partie Mlle de Pelleporc ; car, Aimé Martin n’ayant connu Bernardin que dans ses dernières années, bien des circonstances de sa vie n’avaient pu lui être révélées que par sa veuve, et cette femme, qui avait remplacé Mlle Didot pour être la protectrice et la deuxième mère de ses enfans, se conduisait, — disait-il, — d’une façon étrange, puisqu’elle dédiait au roi un ouvrage tout rempli de diffamations contre leur famille !

Aimé Martin avait été un peu loin dans son appréciation de la conduite de Didot-Saint-Léger ; aussi, malgré son avocat Me Berrier, le tribunal le condamna-t-il, le 18 mai 1821. Aimé Martin en personne fit tous ses efforts pour prouver le mal fondé des paroles dites par Saint-Léger, et justifier ainsi ce qu’il avait écrit sur ce dernier ; il dut même soumettre à ses juges les lettres que nous avons publiées, afin qu’ils apprécient l’amour des deux fiancés et la tendresse des deux époux ; mais je crois qu’il ne leur montra point tout. En effet, la plupart de ces lettres portent, en marge, des suscriptions au crayon ; l’on y voit le mot : bon, qui voulait dire sans doute : passage à lire au tribunal ; en tête de l’une d’elles, on lit cette mention écrite à l’encre : « lettre qui prouve qu’il ne l’a point séduite[2] » ; les phrases

  1. Quérard commit donc une erreur dans la France littéraire, en disant que ce procès avait été intenté par le père de la première femme de Bernardin (Quérard, tome VIII, p. 367).
  2. Lettre n° 2.