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« 300 bouteilles de vin de Champagne de la maréchale d’Estrées, qui les vend au Roy et à Monsieur quatre livres la bouteille, une belle pendule d’un goût tout nouveau qu’on achève actuellement et le surplus en livres, et, à cet effet, j’ai chargé quelqu’un d’examiner, dans sa bibliothèque, les bons livres qui lui manquent. »

Quel dommage de n’avoir pas la liste de ces bons livres et d’ignorer ce qu’est devenue la belle pendule d’un goût tout nouveau ! Il n’est pas sans intérêt d’ajouter que les 3 000 livres, ainsi d’ailleurs que 2 000 autres, consacrées à des usages analogues, furent prises sur le premier profit de la vente des terrains, de sorte que les capucins payèrent les frais de leur disgrâce. M. de la Sablonnière eut pour sa part 1 200 livres et voici la lettre qu’il écrivit aux consuls pour les remercier : « J’ose dire, messieurs, que ce présent est en pure perte pour vous et que vous ferez bien de cesser de m’en faire parce que mon attachement pour vos intérêts est si complet qu’aucun espoir ne peut l’augmenter. Le plus grand cadeau que puissiez-vous me faire, c’est de me procurer l’occasion de vous en donner des preuves. »

Dieu ! qu’en termes galans ces choses-là sont dites !… Et qu’une quittance de ce style est d’un autre goût qu’une sèche signature au bas d’un chèque !… Mais le comble, comme nous disons dans notre vilaine langue d’aujourd’hui, c’est que les consuls toulonnais n’eurent aucun scrupule à présenter les comptes de leurs divers « cadeaux » à M. de La tour, intendant de Provence. L’intendant était homme d’esprit et savait son monde. Le charmant billet que voici fut toute sa semonce : « Je sais, messieurs, l’utilité dont peuvent vous être à Paris les personnes que vous employez pour les offices de votre communauté. Il est assurément très juste de les récompenser de leurs soins ; mais ce sont des arrangemens qui doivent se passer dans l’intérieur de votre administration et que je ne saurais autoriser spécialement. »

Une grosse affaire encore, ce fut, en 1786, la construction de l’hôtel du commandant de la Marine (la préfecture maritime d’aujourd’hui). Où le mettre, cet hôtel ? A l’Est de la place ? Mais d’importans personnages venaient d’y bâtir, — sur le terrain de ces pauvres capucins, — une rangée de maisons d’autant plus coûteuses que la ville leur avait imposé des façades