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les Associations constitutionnelles, qui, vers 1820 et après, se donnèrent justement pour objet déclaré de combattre cette extension de la « franchise » électorale que les Associations rivales se donnaient pour objet de conquérir. La plus puissante peut-être de toutes les Associations, au moins si l’on en juge par le résultat obtenu, fut l’Anti-Corn-Law League de Cobden et de Robert Peel ; « à l’encontre, dit M. Ostrogorski, — il vaudrait sans doute mieux dire : à la différence, — de l’Association catholique et des Unions politiques, elle fit capituler les pouvoirs devant une organisation extra-constitutionnelle, par la seule force de l’opinion qu’elle entraînait à sa suite. »

Cependant, « aucune de ces organisations extra-constitutionnelles (toutes ces Unions, toutes ces Associations) ne tendait à devenir à jamais un pouvoir régulier dans l’Etat ; leur intervention était considérée comme exceptionnelle et comme imposée par les circonstances ; leur agitation était dirigée moins contre l’économie établie du gouvernement représentatif que contre les partis égoïstes qui l’avaient accaparée. » C’est ce cadre étroit et rigide des partis, c’est ce régime des partis, et des partis de classe, historiquement fixés et figés, c’est cela que l’on veut briser. Mais, par un contre-coup auquel il fallait s’attendre, les partis politiques, les partis permanens, « visés par les organisations extra-constitutionnelles qui poursuivaient des réformes, » allaient avoir eux-mêmes « recours à l’organisation extra-parlementaire. » Avant 1832, ils n’avaient pas d’organisation en dehors du Parlement, et ils n’en avaient pas besoin ; » à partir de 1832, « les influences territoriales » et « la corruption des électeurs » ne suffiraient plus à leur fournir leurs contingens[1] ; les anciens programmes ne suffiraient plus à les entraîner, l’ancienne discipline à les retenir, l’ancien chef à les commander : c’est bien la transformation de l’ancien parti ; elle s’opère exactement à l’heure de la première extension du droit de suffrage ; et la coïncidence est si parfaite qu’il semble que ce soit plus qu’une coïncidence entre les deux faits, qu’il y ait, de l’un à l’autre, une conséquence.

  1. Ostrogorski, ouvrage cité, I, 120-125.