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Association de s’interposer entre moi et un collège électoral que je représente depuis si longtemps. Je suis député pour la ville, et je ne peux pas considérer comme correct de me faire le mandataire ou le délégué d’une organisation quelconque existant dans la circonscription, si importante soit-elle et si complet que soit mon accord avec elle sur les questions politiques. »

Les Trois Cents ne furent point embarrassés de ce scrupule, pourtant si légitime, et à ce raisonnement, si bien fondé en logique et en droit, leur président répliqua en leur nom « qu’en face d’un candidat qui se permettait d’ignorer ou de contrecarrer les décisions du parti pour suivre son intérêt personnel, son devoir à lui, président, était de soutenir l’Association ; qu’un candidat n’avait pas le droit d’en appeler à l’ensemble du corps électoral ; qu’il devait obéissance à son parti et à son comité dûment nommé ; et que, si Forster se respectait, il s’inclinerait devant la règle énoncée dans le §15. »

Le plus beau, c’est que ce même président avouait volontiers qu’entre Forster et l’Association, il n’existait d’ailleurs, à ce moment, aucune divergence d’opinions. Il ne s’agissait donc que d’une question de principe, d’un acte de foi ou d’obéissance. On ne demandait à Forster que de réciter la fatiha : « Il n’y a de Dieu que l’Association, et X… est le prophète de l’Association. » Qui ne prononce pas cette formule est infidèle, et qui est infidèle sera exterminé. M. Schnadhorst, de Birmingham, l’entendait au sens strict : « John Bright lui-même, disait-il, aurait à, briguer l’honneur d’être adopté par l’organisation du parti, et à courir le risque d’être accepté ou rejeté par elle. »

Cependant, la querelle de Forster et du Caucus de Bradford occupait toute l’Angleterre. La presse prenait position pour le député ou pour le Comité : « Si un homme public tel que Forster, faisait remarquer le Times, peut être forcé de passer sous le joug de l’Association, que faut-il attendre de In plupart des hommes politiques, moins en vue et moins indépendans ? » Quant à la ville elle-même de Bradford, elle était en révolution : « Forster comptait dans sa circonscription électorale de nombreux amis, des admirateurs. Le Caucus s’appliqua à détacher de Forster ses partisans, à lui aliéner l’affection des masses et à faire le vide autour de lui. Une violente campagne fut ouverte, on le dénonçait de maison en maison, on le stigmatisait dans les meetings comme un traître à la cause du libéralisme. Le mot d’ordre donné