Page:Revue des Deux Mondes - 1904 - tome 21.djvu/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Fez, Mékinez et Marrakech, de trois bitsel-mal, placés dans la kasbah, sous la garde du pacha de guich. A chacun d’eux est attaché un amin-essayer, chargé d’effectuer les paiemens, sauf à Fez, où cet office est confié à un conseil de trois oumana, formant le Dar-Addeyel. Les impôts perçus en nature aboutissent aux magasins généraux du makhzen, qui sont placés, dans les trois villes précitées, sous la surveillance d’oumana-el-mers.

Quel que soit le service dont il est chargé, chaque amin est tenu d’envoyer au makhzen. en double exemplaire, un état hebdomadaire de SOS recettes et son bilan mensuel ; dans les sept jours qui suivent la fin du mois, l’amin doit avoir dressé et expédié à la Cour le compte détaillé de l’exercice du mois écoulé. En outre, au moment de quitter leurs fonctions, les oumana se présentent au makhzen, avec un compte général de leur gestion, afin qu’il leur en soit donné décharge. Un exemplaire des états ainsi fournis est remis au sultan et communiqué par lui au contrôle de la beniqa spéciale faisant office de Cour des comptes ; l’autre est retenu par le ministre des Finances, qui le fait transcrire sur un grand livre, tenu constamment à jour et marquant ainsi, en recettes et en dépenses, la situation exacte du Trésor. On voit que les oumana ont apporté dans la comptabilité publique les habitudes régulières des maisons de commerce, dont ils sont issus ; mais ils n’ont pas cherché à dégager des règles propres aux finances de l’Etat ; ils ne dressent pas de budget et ne se règlent par aucune prévision de dépenses. Aussi le système financier du makhzen se trouva-t-il excellent, tant que l’Etat fut géré avec une traditionnelle économie, distribuant libéralement les produits en nature tirés de l’impôt, mais réservant les espèces pour les besoins éventuels. Quand vinrent les réformes coûteuses et les fantaisies de Moulay-abd-el-Aziz, elles bouleversèrent du premier coup tous les comptes de l’Etat : pour donner des traitemens aux fonctionnaires et acquitter les commandes chérifiennes, il fallut beaucoup d’argent comptant, et il était impossible de s’en procurer, en proportion suffisante, avec des revenus qui ne paraissent pas dépasser un total d’une vingtaine de millions, dont la moitié environ fournie par les douanes.

L’expérience actuelle a révélé que le système militaire n’était pas beaucoup plus apte que le système financier à supporter les soubresauts imprimés par le jeune sultan à la politique makhzénienne ;