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bijoux d’or les remissent à la Banque : l’empereur et l’impératrice donnaient l’exemple en envoyant toutes les vieilles pièces conservées au Palais ; beaucoup de nobles et de fonctionnaires les imitèrent. Les ressources ainsi fournies ne peuvent toutefois être très considérables, le stock de métal jaune n’étant pas élevé au Japon. A propos de ces expéditions d’or, il est curieux de noter que les Etats-Unis, ayant environ 200 millions de francs à payera la France pour le rachat du canal de Panama, au moment où ils recevaient cet or japonais, l’ont expédié au Havre. Ce métal est arrivé à Paris à l’époque de la souscription des bons russes, et c’est au moyen de yen japonais que se trouve en partie reconstituée l’encaisse du Trésor russe à l’étranger.

Le Japon a fait comme son adversaire : au bout de peu de semaines de lutte, il émettait un emprunt. Mais il commença par s’adresser au marché intérieur, sur lequel il trouva, dit-on, de 100 à 200 millions de francs, et auquel il vient de s’adresser de nouveau pour un emprunt de 100 millions de yen émis en juin. Les dépêches assurent qu’il a été couvert et que le premier souscripteur a été le mikado, pour 20 millions de yen. Hier, à la suite de ses succès sur le Yalou, il a trouvé un concours empressé auprès de banquiers anglais et américains, qui lui ont pris pour 250 millions de francs de bons du Trésor 6 pour 100 à 7 ans d’échéance, remboursables au pair le 5 avril 1911. Le gouvernement japonais s’est réservé le droit de les rembourser, moyennant préavis de 6 mois, à partir du 5 avril 1907. Ces bons ont été offerts au public à 93 1/2, c’est-à-dire que, s’ils sont, remboursés en 1911, ils auront donné au souscripteur un revenu moyen de près de 7 pour 100 ; s’ils l’étaient en 1907, le revenu ne s’éloignerait guère de 8 pour 100. Ils coûtent davantage au Japon, qui les a cédés, dit-on, à 90 1/2 au syndicat financier chargé de l’émission. Ces bons sont garantis par le revenu des douanes, dont le produit, en 1902-1903, s’est élevé à 44 millions de francs. Le Japon, en dépit de ses premiers succès, a dû consentir à ses prêteurs des conditions plus avantageuses pour eux que celles dont se sont contentés les créanciers de son ennemie ; mais son crédit est beaucoup plus jeune que celui de la Russie, qui a pour elle l’appui du premier marché du monde, et derrière elle un long passé d’honorabilité financière qui rassure les bailleurs de fonds, et lui permettra de trouver toutes les ressources dont elle aura besoin.