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Sadowa, entra dans l’orbite de la politique prussienne, elle paraît vouloir abriter sous l’égide de l’empereur qui règne à Tokio sa régénération aussi bien militaire qu’économique.

L’an dernier, lorsque le Mexique envoya des commissaires en Europe rechercher, d’accord avec les principales Puissances, les meilleurs moyens de modifier son régime monétaire, des délégués chinois se joignirent aux Mexicains et aux Américains du Nord qui s’asseyaient, à la Banque de France, autour de la table des délibérations. Dans un français très pur, MM. Liou-She-Shun et Yen-Chu nous déclarèrent que leur gouvernement désirait une monnaie stable, et ne cachèrent pas leurs préférences pour l’étalon d’or, ou tout au moins pour une réglementation de la frappe des dollars d’argent leur donnant une valeur fixe par rapport au métal jaune, qui cesse d’être l’apanage exclusif des hommes blancs. Différens édits ont déjà été rendus à cet effet ; des frappes ordonnées ; tout récemment, les dépêches signalent un projet de fondation d’une Banque impériale, qui émettrait des billets. Nous assisterons sans doute à l’éclosion d’autres programmes d’une Chine soi-disant émancipée, en réalité sous la tutelle japonaise. Les Européens qui s’occupent d’affaires en Extrême-Orient connaissent l’influence avérée ou occulte des « Nippons. » Un groupe financier se croyait sûr d’obtenir une concession de travaux d’utilité publique dans une ville chinoise : à la dernière heure, les promesses à lui faites furent retirées et toutes négociations rompues, sous la pression d’agens japonais ; Nous verrons peut-être, un jour prochain, la réorganisation ou plutôt l’organisation des finances chinoises, encore rudimentaires[1] s’effectuer sous la direction de fonctionnaires expédiés de Tokio.

Nous avons voulu que le grand empire où règne la morale de Confucius sortît de l’état amorphe qui le caractérise depuis de longs siècles. Nous l’avons forcé de nous ouvrir ses ports, puis ses fleuves ; nous lui avons fourni des armes, qui, à plus d’une reprise, lui ont servi à se défendre contre les expéditions, qu’il nous fallait envoyer de temps à autre pour réprimer des actes de brigandage. Par un illogisme étrange, nous cherchions à rendre fort, dans les arts de la guerre comme dans ceux de la paix, le peuple à qui nous prétendions dicter nos lois. Sous nos

  1. Voyez dans la Revue des Deux Mondes du 1er mai 1901. les Finances chinoises.