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peut faire une collection instructive, en réunissant des échantillons qui représentent les étapes successives de cette transformation, suffisante pour expliquer ce qu’il convient de comprendre sous l’appellation de phénomènes métamorphiques.

Il est important de constater qu’il n’y a pas eu, comme on l’a cru bien longtemps, une époque métamorphique ; tout au contraire, la transformation est parfaitement continue : elle commence, on peut le dire, dès qu’un sédiment est accumulé et elle se continue sans relâche, de sorte que chaque trait d’une roche donnée lui a été communiqué à un moment particulier, tout à fait distinct de la période d’origine et qui peut même en être fort éloigné. Il résulte aussi de là que les caractères observés aujourd’hui dans telle formation sont essentiellement éphémères et que, dans un avenir convenable, ils auront fait place à des caractères tout autres.

Pour préciser ce point, qui est de haute importance pour la théorie générale de la terre, nous pouvons résumer en deux mots l’histoire de ces matériaux argileux qui figurent parmi les dépôts les plus volumineux de l’Océan. A l’époque silurienne, la mer a déposé sur son fond une vase toute semblable à celle qui s’accumule dans tant de localités actuelles ; seulement, au lieu d’enfouir des débris de homards et de crabes, la boue antique a recouvert des carapaces de ces crustacés primitifs qu’on appelle des trilobites. La température du fond marin où ce dépôt prenait naissance pouvait être relativement basse, comme celle des abîmes de nos mers et les matières s’y sont conservées longtemps sans altération notable. Mais les sédimens ont continué à s’empiler les uns sur les autres : sur les vases siluriennes se sont étalées les formations dévoniennes, puis sont venus les dépôts carbonifères, houillers, permiens, triasiques, liasiques, oolithiques, crétacés, ; tertiaires, et, en bien des régions, il en est résulté, pour notre argile à trilobites, un recouvrement effectif de plusieurs kilomètres d’épaisseur.

A mesure que cet ensevelissement se poursuivait tout doucement, la couche considérée, étant progressivement éloignée de la surface du sol, et éprouvant de plus en plus l’influence de la chaleur propre de la terre, avait à subir l’action chimique de moins en moins nulle des eaux peu à peu échauffées. Sénarmont s’est illustré en nous apprenant ce que l’eau chaude peut faire en agissant sur des matières minérales analogues à celles