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conseiller au Roi (de Prusse) de ne point arrêter le noble élan qui l’avait porté à préparer des moyens pour seconder ceux que l’empereur de Russie avait amenés au soutien de la cause de l’indépendance de l’Europe, la détermination de Sa Majesté Impériale de ne pas séparer ses intérêts de ceux de la Prusse ne pouvait être douteuse. Décidé à sauver l’Europe en se liant d’intention et d’effet avec les puissances liguées pour cette fin,… l’Empereur n’a pas dévié un instant de la ligne qu’il s’était tracée. » On lit dans une lettre écrite, le 13 janvier 1813, par Hardenberg, le Hanovrien : « Le comte Stadion — diplomate autrichien, anti-français et fort dans la confidence de Metternich — est convaincu que le comte Metternich veut le même but que nous, — les Anglo-Hanovriens, — à l’exception, cependant, de l’anéantissement de la dynastie de Bonaparte, dont ni lui ni l’Empereur ne veulent être l’instrument ; mais qu’il veut arrivera ce but, à sa manière, en temporisant et en conservant encore l’ouvrage de sa création, l’alliance avec la France. » Mais « quelque attaché que, soit l’Empereur à l’archiduchesse sa fille, et quoique religieusement lié par la foi de ses engagemens, il sacrifiera pas à pas l’un et l’autre de ces liens à des circonstances influentes sur le bonheur de ses Etats. »

Le 12 et le 14 janvier 1813, Metternich reçut Knesebeck. Avec ses partenaires allemands, il affectait volontiers quelque pédanterie de machiavélisme et raffinait sur les « élégances » de procédure. L’alliance de la Prusse avec la France, lui dit-il, a un tel caractère de contrainte manifeste qu’elle permet un saut brusque dans le camp opposé. Depuis le mariage de l’archiduchesse, il n’en est pas de même du lien entre la France et l’Autriche. L’Autriche ne peut s’y soustraire par un dégagement violent, la dignité du monarque en serait compromise. Le principal ouvrage du Cabinet devait donc être de recouvrer toute sa liberté d’une façon digne et juridique, et de se faire affranchir du traité par Napoléon lui-même. Le premier article était de recouvrer la mobilité. L’Autriche la possède désormais tout entière. Elle peut se tourner librement d’un côté ou de l’autre. Le second article sera d’offrir, en même temps, l’entremise à l’Angleterre et à la Russie. L’Autriche le fait. Ce second pas franchi, viendra le troisième : trouver la base d’une paix durable ; l’Autriche espère persuader Napoléon de la proposer. Quant au quatrième pas, à savoir que l’Autriche s’engage à soutenir de toutes ses forces