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au moins indirecte, par le déchet inévitable de ceux qui se casent dans quelque fonction et ne retournent plus au métier. Dans l’industrie textile, on vit, ou, ce qui n’est pas tout à fait la même chose, on travaille plus vieux que dans les mines, dans la métallurgie, dans la construction mécanique, dans la verrerie. En cela encore se marque la variété du type industriel entre ces industries de force et cette industrie d’adresse ; et c’est enfin un de ses caractères, qu’elle occupe beaucoup de main-d’œuvre féminine et de main-d’œuvre jeune. Sur 100 femmes ou filles qui travaillent dans « l’industrie linière, » 24,32 ont moins de 18 ans, 32,26 de 18 à 24 ans, 21,86 de 25 à 34 ans, 10,83 de 35 à 44 ans, 5,65 de 45 à 54 ans, 3,18 de 55 à 64 ans, 1,90 seulement au-dessus de 64 ans.

Sans doute, je tiens à le répéter, ces chiffres eux-mêmes ne parlent pas aussi clairement qu’il le semble, parce que la formule, qui embrasse trop, étreint mal, confondant et mêlant, dans l’unique terme d’ « industrie linière, » outre le chanvre, le jute, et leurs succédanés avec le lin, à la fois la filature et le tissage. Ils prêtent cependant matière à quelques remarques intéressantes, dont l’une est que l’ouvrière, dans l’industrie textile, est plus jeune que l’ouvrier ; autrement dit, alors que, pour les hommes, la courbe ascendante n’atteint le sommet qu’à l’âge de 25 à 34 ans, pour les femmes, elle l’atteint dès l’âge de 18 à 24 ans : pour les hommes, elle ne commence à décroître, et assez lentement, qu’après 35 ans ; elle décroît déjà, pour les femmes, et beaucoup plus rapidement, par bonds qui, de dix ans en dix ans, font tomber la proportion de près de moitié, après la vingt-cinquième année. C’est justement à l’âge où le service militaire prend les hommes que les femmes se trouvent le plus nombreuses à la fabrique ; plus tard le mariage et surtout la maternité les reprennent, et je ne voudrais point affirmer témérairement, mais je crois qu’on pourrait expliquer en partie et presque mesurer leur diminution par l’augmentation de leurs enfans. Ajoutons à cette première raison la double fatigue de l’atelier et du foyer ; puis, au fur et à mesure que la vieillesse vient, les infirmités venues avec elle, ou un peu avant elle : voilà pourquoi, contre 17,43 pour 100 d’hommes de 35 à 44 ans et 13,26 pour 100 d’hommes de 45 à 54 ans, on ne trouve plus, dans l’industrie linière, que 10,83 pour 100 de femmes de 35 à 44 ans, et 5,65 pour 100 de femmes de 45 à 54 ans. Au-delà de