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se soumettre au contrôle de la science de l’homme naturel.

Quels ont été les résultats de ces recherches ? On peut les indiquer d’un mot. Elles ont prouvé que la taille de l’homme n’avait subi aucune variation systématique importante pendant les centaines de mille ans qui se sont écoulés à partir de sa première apparition. Autant qu’il est permis d’en juger d’après les rares épaves que les fouilles ont mises au jour, la stature de l’homme n’a pas éprouvé de changement appréciable. L’homme civilisé est, à cet égard, tel qu’était l’homme primitif.

La considération des animaux a conduit à des conclusions du même genre. La taille des animaux d’une espèce ou d’une variété déterminée ne se modifie point en général ; ou, si elle se modifie, c’est pour des raisons qui n’ont aucun caractère d’évolution chronologique. Geoffroy Saint-Hilaire se fondait précisément sur ce que la taille d’une espèce domestique est identique à celle de l’espèce sauvage, pour admettre que la stature de l’homme n’avait pas dû changer depuis les temps géologiques.


IV

Le plus lointain ancêtre de l’homme paraît être le fameux pithecanthropus erectus. — On se rappelle que c’est dans le courant des années 1891 et 1892, qu’un médecin de l’armée hollandaise, Eugène Dubois, découvrit près de Trinil, dans l’île de Java, quelques ossemens énigmatiques dont les caractères étaient intermédiaires entre ceux de l’homme et ceux des singes anthropoïdes. Il y avait là, dans un gisement, incontestablement de l’époque tertiaire, un crâne complet, un fémur et deux dents molaires.

Si rudimentaires que fussent ces restes, ils permettaient cependant d’assigner à l’être dont ils provenaient sa place et son rang dans la hiérarchie animale ; — et cette place est intermédiaire entre le singe anthropoïde, le gibbon, et l’homme même. Le fémur, dont la forme indique l’adaptation à la stature debout, trahit l’homme ; le crâne, dont la capacité est à la fois trop petite pour l’homme ; mais un peu grande pour le singe, révèle un anthropoïde supérieur. Ces restes énigmatiques présentaient un degré de fossilisation qui était en rapport avec leur antiquité, et qui permettait de les manier sans risques. Ils ont été promenés dans toute l’Europe et présentés à l’examen de tous