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LE RETOUR DU ROI
EN 1815[1]


I

Paris avait capitulé après trois jours de combats partiels ; Pendant cette feinte résistance, la population s’était de plus en plus divisée. Le grondement du canon exaltait les uns, désespérait ou tout au moins dépitait les autres. « On va donc se défendre ? » disaient les impulsifs, qui sentaient plus qu’ils ne raisonnaient. « Comment ! on se défend ? » pensaient les gens d’esprit rassis en qui l’intérêt dominait tout. Au reste l’appréhension des violences et du pillage n’était pas bien sérieuse. Les belliqueux n’avaient pour la plupart rien à perdre. Les pacifiques, s’ils déclamaient volontiers sur les dangers auxquels une défense exposait Paris, ne croyaient guère à la réalité du péril. Ils avaient trop de confiance en M. Fouché ! Ils pensaient bien que cet habile homme trouverait le moyen d’arrêter l’action avant qu’elle ne pût avoir des conséquences redoutables. L’année précédente, on s’était aussi battu tout proche, le combat s’était même étendu jusqu’à la barrière de Clichy, et l’armée alliée n’en avait pas moins eu « la plus louable conduite » à son entrée dans Paris. Wellington ne voudrait point saccager la bonne ville de son ami Louis XVIII ; il saurait imposer la modération au farouche Blücher. Bien plus que les excès des Prussiens, la haute

  1. Documens des Archives nationales, des Archives de la Guerre et des Archives des Affaires étrangères, Papiers de Carnot, Mémoires inédits, Correspondances et Mémoires des contemporains.