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La hausse a continué jusqu’en 1876, s’est arrêtée, en 1880, celle qu’on observe de 1790 à 1796 se rattache aux réformes fiscales et à la suppression de la dîme.

Il faut insister sur cette vérité consolante, que, depuis 1800 jusqu’en 1879, la rente de la terre est en hausse progressive : accroissement dans les rendemens, introduction de nouvelles cultures comme la betterave, augmentation de la consommation, de la population et du bien-être, amélioration des moyens de transport, grands travaux publics, voilà les causes évidentes de ce progrès.

En 1790, Lavoisier estime le revenu foncier de la France à 1 200 millions ; les statistiques officielles le portent à 1 500 millions en 1815, à 1 824 millions en 1851, à 2 45 millions en 1879, c’est une hausse de 41,80 pour 100. Consultons un peu les monographies. A Saint-Genest (Vosges), l’hectare de terre se loue 25 francs en 1789, 56 francs en 1852, 63 francs en 1858, 55 francs en 1867, 49 francs en 1876. A Jouy-le-Châtel (Seine-et-Marne), 32 fr. 70 en 1807, 48 fr. 70 en 1838, 82 fr. 90 en 1860, 84 francs en 1885. A Sartilly (Manche), 40 francs en 1789, et 100 francs en 1875.

Survient la désastreuse récolte de 1879, suivie d’années moyennes ou médiocres : les Etats-Unis nous envoient leurs blés, les prix s’avilissent, beaucoup de cultivateurs se ruinent, liquident, jettent le manche après la cognée ; mais les autres, en majorité, redoublent d’efforts, combattent le bon combat, augmentent les rendemens, si bien que l’agriculture française a fait plus de progrès en vingt-cinq ans qu’elle n’en avait accompli dans les quatre-vingts années précédentes. Ses défenseurs réclament un droit de 3 francs, on les appelle les chevaliers du pain cher ; ils répondent que leurs adversaires sont les chevaliers de la misère agricole et font la solitude dans les campagnes. Que de candidats battus sur cette question du droit de trois francs ! Aujourd’hui le blé étranger est frappé d’un droit de 7 francs par quintal qui n’a pas encore empêché l’avilissement des prix ; ceux-ci demeurent très faibles, plutôt par l’accroissement de la production indigène que par la concurrence étrangère.

Diminution des profits pour les cultivateurs, diminution des fermages. La crise agricole, écrivait M. Risler, est surtout une crise des fermages. La baisse ne cesse plus de s’accentuer. A