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J’apparaîtrai ; pareille à ces roses noircies
Et sèches, comme sont les antiques momies ;
Car des papillons morts on garde les couleurs
Mais non celles, hélas ! des femmes ni des fleurs !
Alors, vous qui rêviez dans l’ombre morne et froide
On vous arrachera de mon doigt noir et roide,
Vous revivrez, Opale ! en reflétant le jour…
Et moi je resterai sans souffle et sans amour.


LUNE SUR LA MER


Au fond du crépuscule vert
Le croissant de la lune a l’air
D’un coquillage,
Et nacré, courbe, lisse et clair
Polit les conques de la mer
A son image.

A quelle oreille dans la nuit
Lune triste ! se plaint et luit
Mystérieuse,
Votre voix pareille à ce bruit
Houleux qui s’enfle, et qui remplit
La conque creuse ?

Divine lune, ta rumeur
Voudra-t-elle bercer mon cœur
Qui se lamente ?
Verse à mon rêve ta lueur
Ainsi qu’à la nocturne fleur
L’arbre et la plante !

Le pin léger, noir et vibrant,
Garde encor ton étrange chant
Sous son écorce ;
Harmonieux, sombre et mouvant,
Ton murmure il le livre au vent,
O lune torse !