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Le second travail qui s’imposera à la Commission est donc un travail de correction, de mise au point, ne touchant pas aux principes de notre législation.

Mais il ne s’agit pas de rédiger de toutes pièces un code nouveau de législation ouvrière, et d’y faire entrer des dispositions nouvelles dont l’adoption paraîtrait désirable à la Commission. L’œuvre serait immense, trop complexe, et n’aurait guère de chances d’aboutir. En se donnant la tâche d’édifier une législation complète, elle empiéterait sur les attributions du Parlement. Il ne s’agit en somme pour elle, et sauf retouches de détails ou de formes, que de préparer avec les dispositions existantes un code méthodique et clair, présentant dans une vue d’ensemble la totalité des dispositions actuellement en vigueur, et qui puisse être considéré par le Parlement comme devant être adopté sans débats.

Définir ainsi les attributions de la Commission, ce n’est pas les amoindrir. La mission qui lui est confiée à un intérêt de premier ordre, et elle rendra un service éminent aux intéressés et au législateur lui-même : aux intéressés, en plaçant sous leurs yeux une législation mieux coordonnée ; au législateur, en faisant apparaître les lacunes de la législation ouvrière.

En montrant dans un ordre logique ce qu’est actuellement la législation ouvrière, la Commission fera nécessairement apparaître ce qu’elle doit être, et le législateur saura mieux sur quels points doit désormais porter son effort réformateur.

Il en résulte que, même en se bornant à clarifier, pour ainsi dire, les dispositions existantes, la Commission apportera son concours à l’élaboration des dispositions futures.


La tâche tracée de la sorte, restait à trouver l’instrument avec lequel on l’exécuterait. Le Parlement, on n’y pouvait songer, la raison en est évidente. « Une telle œuvre, lisait-on dans l’exposé des motifs de la proposition de résolution du 15 janvier 1903 « tendant à inviter le Gouvernement à soumettre à la Chambre un projet de Code de travail, » cette œuvre de confrontation, de coordination, de classification, de codification, n’est guère du ressort, ni, — pourquoi ne l’avouerions-nous pas ? — de la compétence du Parlement, agité par trop de passions, absorbé par trop de soucis ; et nous ne dirons pas qu’il ait de quoi mieux employer son temps ; toutefois, il a de quoi l’employer autrement. » Mais on pouvait, au contraire, penser au Conseil d’État ; il était naturel et logique qu’on y pensât : « Nous avons un Conseil d’État, dont c’est la fonction propre, et qui est pleinement qualifié pour cette tâche ; qui doit, dans le passé, à des tâches pareilles la meilleure part de son renom et de son autorité ; qu’on a peut-être imprudemment laissé se désaccoutumer un peu de ces vastes entreprises, en l’attachant à de plus petites