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est intervenu avec une adresse dont il se sait à lui-même le plus grand gré. Comment s’y est-il pris pour obtenir de la complaisance de M. le Président de la République, ou simplement de sa distraction, un décret qui ratifiait la révocation des grands vicaires, la lumière n’est pas faite sur ce point ; mais le décréta été signé et M. Combes en a éprouvé quelque orgueil. — Cette fois, s’est-il écrié, il faudra bien séparer l’Église de l’État, car il n’y a pas d’autre moyen de se tirer d’embarras ! — Cela n’est pas bien sûr ; mais, à supposer qu’il dise vrai, M. Combes a commis une nouvelle et grave incorrection. A quel moment, en effet, a-t-il soumis à M. le Président de la République le décret relatif aux grands vicaires de Dijon ? C’était après la remise de sa démission. Il n’était plus chargé, alors, que de l’expédition des affaires courantes, et, certes, il s’agissait ici de tout autre chose. M. Combes a voulu engager, bon gré mal gré, ses successeurs encore inconnus dans une voie déterminée. Il n’avait pas le droit de le faire, et le mot de supercherie est le seul qui s’applique à sa conduite. Dans quelle mesure Mgr Le Nordez a-t-il été son complice ou sa dupe ? A cet égard toutes les hypothèses sont permises, et nous ne sommes pas assez éclairés sur la conscience de ce prélat pour en émettre une.

Il s’en faut toutefois de beaucoup que l’imbroglio dijonnais soit aussi inextricable qu’on le prétend. D’abord, et ce serait le plus sage, le gouvernement de la République peut toujours accepter la démission de l’évêque : le chapitre aurait alors des moyens réguliers de pourvoir à la vacance du siège épiscopal. Si le gouvernement, tenant compte de ce qu’il y a eu de discutable dans la manière dont cette démission a été imposée à Rome, persiste à la refuser, il peut retirer le décret par lequel la destitution des grands vicaires a été homologuée, et, en vérité, rien n’est plus simple. Mais il ne fera ni l’un ni l’autre. Dans le premier cas, il aurait l’air de s’incliner devant Rome, ce qui peut-être serait grave : dans le second, il aurait l’air de se rebeller contre M. Combes, ce qui le serait encore plus. Eh bien, qu’il laisse les choses en l’état à Dijon. Quelques intérêts en souffriront sans doute, mais tout ne sera pas perdu pour cela. M. Combes a dit, et les journaux ont répété qu’on ne pourrait plus payer un seul traitement ecclésiastique dans tout le diocèse. C’est une difficulté qui n’embarrassera pas beaucoup M. le ministre des Finances : il en a vu et en a surmonté bien d’autres !

Il est toutefois fâcheux de constater que, parmi nos diocèses officiellement pourvus d’un évêque, il y en a deux, ceux de Laval et de