Page:Revue des Deux Mondes - 1905 - tome 26.djvu/369

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

environ le vote d’ostracisme ; mais lorsque l’intolérante motion revint à l’ordre du jour, les catholiques gardèrent le silence et mirent une joie discrètement maligne à laisser le parlement commettre une bévue, en frappant, en même temps que les Jésuites, « les Rédemptoristes et les Liguoriens. » L’ignorant rapporteur s’était figuré que les Rédemptoristes étaient un ordre, et les Liguoriens un autre ; on eût dit qu’il dédoublait ses victimes, pour se donner la sensation de frapper plus fort et d’un coup plus sûr. Mais, en dépit de ces représailles radicales, l’Église catholique sortait à demi victorieuse des délibérations de Francfort, puisqu’elle en sortait autonome.

Montalembert, bientôt, allait tirer de cette histoire un argument pour montrer ce que l’Église peut gagner à un régime de discussions. L’exemple, en effet, était décisif, et d’autant plus frappant qu’il était confirmé par un autre spectacle que donnait la Chambre berlinoise. Là aussi, de juillet en octobre, une commission parlementaire avait travaillé, sous la présidence de Waldeck, un homme de gauche, pour élaborer une constitution ; et dans le projet qu’elle avait rédigé, le principe de l’indépendance de l’Église à l’endroit de l’État, aussi bien dans ses affaires intérieures que dans l’administration de ses biens, était expressément défini.

Geissel déplorait, à Berlin comme à Francfort, les votes émis au sujet de la question scolaire ; mais à Berlin comme à Francfort, on émancipait l’Église ; et dans cette Prusse où le Hohenzollern, de père en fils, passait pour l’évêque suprême, le présent fait à l’Église romaine par le démocrate Waldeck avait une portée dont bientôt les catholiques s’aperçurent et dont ils profitèrent.


IV

Ne point affecter les allures d’un parti, qui, par sa cohésion même, provoque des coalitions hostiles ; et rester au contraire éparpillés à leur gré dans les diverses fractions parlementaires : telle fut l’opportune et fructueuse tactique qu’adoptèrent, tant à Francfort qu’à Berlin, les représentai catholiques. Trop faibles encore pour former un groupement imposant, ils étaient prématurément mêlés à des questions trop graves et trop complexes pour qu’ils osassent concerter entre eux, sur chacune de ces