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pas à venir et les reçoivent mal ; ils restent chez eux. Il y avait bien un moyen qui aurait tout rendu facile, le vote par correspondance. Auguste, nous dit-on[1], y songea. Mais soit que l’organisation fût défectueuse, soit que les Romains de Rome n’aient pas vu d’un œil favorable l’importance qu’allaient prendre les Romains de province, la mesure ne réussit pas. Quelques années plus tard, la question fut résolue, mais d’une manière différente et plus radicale. Tibère supprima les comices populaires et personne ne vota plus que le Sénat, où les provinciaux comptaient des représentans très distingués. C’est ainsi que tous les citoyens furent mis sur le même pied, ceux de la ville et ceux du dehors ; que Rome cessa d’être l’Etat tout entier, ce qu’elle était autrefois, pour n’en être plus que la capitale ; et que l’impérialisme, comme nous disons aujourd’hui, put définitivement s’établir.

Quintus n’ignorait pas que les villes italiennes songeaient, dès cette époque, à profiter de leur droit de vote ; aussi annonce-t-il à son frère, comme une chose assurée, qu’elles vont envoyer « une multitude de citoyens qui voteront pour lui. » Et non seulement ils arriveront en grand nombre, mais il faut croire qu’il en viendra de très loin. Dans une lettre à son ami Atticus, Cicéron lui apprend qu’il va faire une tournée électorale sur les bords du Pô, « car, lui dit-il, les suffrages de la Gaule sont fort à ménager. » La Gaule se prépare donc aussi, malgré la distance, à envoyer à Rome des électeurs, et ces électeurs seront favorables à Cicéron, qui est sorti, comme eux, d’un municipe. Il n’est donc guère douteux qu’aux élections du mois de juillet 690, les gens des municipes italiens étaient nombreux au Champ de Mars. Nous le savons de ceux d’Arpinum et de Réate ; nous pouvons le soupçonner de beaucoup d’autres. Plus tard Cicéron retrouva le même empressement, les mêmes hommages, lorsqu’il revint d’exil, et il nous dit qu’il fut porté de Brindes à Rome « sur les épaules de l’Italie. »


II

Quand Quintus affirme à son frère qu’il a les plus grandes chances d’être nommé, ce ne sont pas de vains encouragemens

  1. Suétone, Aug., 46.