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aversion pour les « compromis, » et parlant un jour, en 1865, d’un homme qu’on qualifiait devant lui de « modéré, » il disait : « J’abhorre cela, parce qu’il me semble que cela veut dire d’ordinaire un homme qui manque de courage moral ou spirituel pour donner à ses principes leur issue légitime[1]. » Bien qu’étranger personnellement à toute tentation d’aller à l’Eglise romaine, il ne craignait pas de chercher l’aliment de sa piété, qui était sincère et profonde, dans les pratiques de cette Eglise. L’un de ses livres préférés était les Exercices spirituels de saint Ignace. Dans ses voyages en terre catholique, il fréquentait les lieux de prière, vénérait les souvenirs de nos saints, s’attendrissait, par exemple, à la visite des lieux où avait vécu le curé d’Ars. Il avait la dévotion de la Croix ; un artiste ami lui ayant offert de peindre pour lui un tableau : « Peignez-moi, pour ma chambre, lui dit-il, une grande figure de Jésus crucifié, et peignez-la autant que possible fidèle à la réalité. Que cette figure soit, comme elle était, meurtrie, couverte de blessures, labourée par les coups de fouet. » Et c’est aux pieds de cet austère crucifix, devant cette image ensanglantée, qu’il faisait sa méditation journalière et disait ses prières. Quand le service des autres l’appelait au dehors, on le voyait marcher dans les rues, récitant son office, à ce point absorbé qu’il lui en advint plus d’une fois des heurts douloureux[2]. Il avait été l’un des premiers associés de la Confrérie du Saint-Sacrement. Master de la Société de la Sainte-Croix, il s’était volontairement soumis à ce qu’il y avait de plus strict dans les règles de cette société, notamment au célibat.

Mackonochie avait tout de suite introduit, dans sa paroisse, un ritualisme fort avancé, si bien que les services de S. Alban passèrent bientôt pour être le type du genre. Ce n’était pas, de sa part, préoccupation d’esthétisme ; il n’était rien moins qu’artiste ou poète ; les formes ne l’intéressaient qu’en tant qu’elles lui paraissaient une manifestation nécessaire et efficace des vérités qu’il voulait restaurer dans l’âme du peuple, particulièrement du culte eucharistique et du sacrement de pénitence. Rendre les célébrations de l’Eucharistie plus nombreuses et plus solennelles, les communions plus fréquentes et plus ferventes, propager l’habitude de la confession, était sa grande préoccupation.

  1. A. H. Mackonochie, A memoir, p. 75 et 136.
  2. Memories of a Sister of S. Saviour’s Priory, p. 179-180.