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Jusqu’à présent, les cadets et les mousses recevaient leur instruction en groupes séparés sur le Britannia, l’Isis, l’Aurora, et divers autres bâtimens anciens. Ils seront désormais embarqués sur des bâtimens modernes, ayant une valeur de combat, et qui seront groupés en une escadre dite du « service spécial. » Cette escadre aura pour chef le commandant actuel de la station de l’Amérique du Nord et des Indes Occidentales, supprimée. Elle se composera de six bâtimens et formera la « quatrième escadre » de croiseurs. Elle aura sa base non plus en Amérique, mais en Angleterre, à Devonport. Chaque année, elle fera trois croisières d’exercices pour les cadets et les mousses dans les Antilles ou sur les côtes des États-Unis et du Canada ; mais, après chaque croisière, elle reviendra dans la métropole, et les arrangemens seront pris pour qu’elle passe annuellement 22 semaines en Angleterre et 30 semaines en croisière. Si une guerre éclatait, les mousses et les cadets seraient immédiatement transférés dans la métropole, et les équipages des bâtimens ainsi affectés à l’instruction seraient complétés dans le plus bref délai. L’escadre serait mise à la disposition des commandans de flottes pour participer aux opérations actives.

La suppression de la division du Pacifique, qui avait sa base à Esquimalt, de la division de l’Atlantique Sud, qui n’avait point de base permanente, de la division de l’Amérique du Nord et des Antilles, qui avait pour bases Port-Royal (Jamaïque) et Halifax (Nouvelle-Écosse), a causé en Angleterre un profond étonnement. Si un principe naval paraissait bien établi, c’est celui de la nécessité, pour l’efficacité d’une flotte et sa puissance de rayonnement, de l’existence dans toutes les mers d’un grand nombre de stations de charbon et de bases maritimes, avec toutes les installations nécessaires pour le ravitaillement et les réparations. La pensée de tous s’est immédiatement reportée aux conclusions de la grande commission royale, présidée par lord Carnarvon, où était proclamée l’importance de la Jamaïque comme centre de tous les intérêts anglais dans les mers de l’Amérique centrale.

Comment expliquer un tel changement de politique ? Pourquoi ces suppressions ? N’y avait-il pas là une étrange déperdition de force réelle, et quelle cause pouvait la justifier ? Abandonner la station de la Jamaïque, n’était-ce pas renoncer publiquement à la défense des îles dans les Indes Occidentales ?