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les dispositions, après tout assez limitées, de ses articles, que d’après la pensée dont elle était née, qui l’avait fait voler et que Disraeli, dans la discussion, venait de crier assez haut pour que tout le monde l’entendît : elle apparaissait comme une déclaration de guerre, un signal de persécution, salué par les uns avec une passion sauvage, soulevant les récriminations indignées des autres. Ce trouble et cette excitation suggéraient les prévisions les plus sombres aux observateurs de sang-froid. Church écrivait de Londres à son frère :


Vous avez choisi le bon parti, en ne venant pas ici. Vous y auriez trouvé seulement une chaleur accablante et, dans l’Église, les commencemens d’un brisement intérieur, provenant de l’impatience et de la folie des gouvernans et des gouvernés. L’Eglise d’Angleterre, au début de l’année, apparaissait comme la plus forte et la plus riche en espérances des Eglises de la Chrétienté, avec beaucoup d’excès et de folies en elle, comme dans toute chose humaine qui a vie, mais croissant dans la seule œuvre pour laquelle une Église doit vivre, ramenant, consolant, unissant les hommes, leur enseignant à adorer la Beauté et la Gloire invisibles et à se réjouir en elles. L’ignorance de quelques-uns, l’orgueil des autres, l’injustice soupçonneuse d’hommes même sages et bons a conduit les choses à un point tel que ceux qui, depuis cinquante ans, s’étaient constamment refusés à croire à un brisement, en sont venus à le considérer en face[1].


Malgré tout, l’auteur principal de la mesure, Tait, ne songeait qu’à se réjouir d’avoir fait enfin passer ce qu’il appelait avec insistance « son bill ; » et sa satisfaction était d’autant plus vive, qu’il s’était donné beaucoup de mal et avait traversé de nombreuses et inquiétantes péripéties. Aussitôt le vote dernier acquis, il avait écrit, de la Chambre des lords, à la Reine : « . Grâces soient rendues à Dieu, le bill a passé. » Il ajoutait sur son journal : « J’ai reçu des félicitations de tous côtés. Ainsi finit un travail qui ne m’a laissé aucun repos pendant six mois. » Et dans un autre passage de ce journal : « En vérité les événemens de ces derniers temps nous donnent des motifs de gratitude envers le Dieu tout-puissant. J’ai confiance que l’excitation va maintenant mourir et que l’Église reviendra de cette agitation à son œuvre légitime qui est de gagner les âmes… Puisse Dieu bénir cette œuvre[2] ! » On verra bientôt quelle mortifiante déception les faits réservaient au primat et à ceux qui l’avaient suivi.

  1. Life and Letters of dean Church, p. 244.
  2. Life of Tait, t. II, p. 234 et 235.