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l’Eglise de Rome, et Pusey avait commencé, à cette fin, l’adaptation d’un manuel de l’abbé Gaume. Diverses circonstances ayant retardé la conclusion de ce travail, le Rev. Chambers, Ritualiste de marque, master de la Société de la Sainte-Croix, fort considéré pour le zèle apostolique déployé par lui dans les quartiers populaires de Londres, entreprit et mena à bonne fin une autre adaptation du même ouvrage ; après sa mort, la Société de la Sainte-Croix le fit imprimer, en ayant soin de ne pas le mettre dans le commerce et de ne le distribuer qu’aux clergymen qui justifiaient pratiquer la confession. C’est le propre des livres de ce genre qu’on est condamné à y aborder certains sujets répugnans. Il n’y a pas plus à en être choqué que des livres de médecine où l’on traite forcément des maladies honteuses. L’important est que l’ouvrage ne serve qu’à son objet déterminé et ne soit pas à la portée des curiosités malsaines ; aussi est-il, chez les catholiques, d’ordinaire écrit en latin, et la circulation en est-elle soigneusement limitée. Mais on conçoit que certaines citations isolées, jetées dans un public non préparé, puissent étonner et fournir matière à des indignations sincères ou non. C’est une arme de polémique, connue de longue date des adversaires du clergé, et dont, en tous pays, notamment en France[1], ils ont fait plusieurs fois usage, non sans un succès momentané. L’effet en était plus facile encore en Angleterre, où, depuis trois siècles, l’esprit public était habitué à considérer la confession comme une pratique détestable et contraire à l’esprit anglais. Aussi le cri de scandale, poussé à la Chambre des lords, eut-il une longue et puissante répercussion dans le Parlement, dans la presse, dans les presbytères, dans les salons et dans le peuple. L’opinion était plus excitée encore qu’elle ne l’avait été sur le même sujet, en 1873. Des pétitions sommaient l’épiscopat de sévir. Le Times décrétait :


Le peuple anglais, dans son ensemble, n’a qu’une chose à dire sur un pareil système… Il s’inquiète peu des raisons qu’on peut faire valoir en sa faveur… Sa résolution est prise : il n’en veut pas ; il n’en veut à aucun prix. Il n’est pas d’institution qu’il ne fut disposé à sacrifier, pas de système qu’il ne répudiât, s’ils devenaient le refuge et l’asile de telles pratiques… Si

  1. Ainsi avait-il été fait, en 1843, lors des débats sur la liberté d’enseignement (cf. mon Histoire de la monarchie de Juillet, t. V, p. 498). Trente-six ans plus tard, la même campagne était reprise par M. Paul Bert, à la tribune de la Chambre républicaine.