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charmante, le voyageur qui remonte le fleuve sacré pour se rendre au milieu des rochers de la Nubie. Le spectacle admirable de ce ciel merveilleux est représenté sur tous les plafonds des temples de la Haute-Egypte.

Le sol, d’une fertilité prodigieuse, est irrigué sans relâche par la plus laborieuse des races humaines qui semble même, bien souvent, ignorer le repos de la nuit. Chaque année, ces plaines toujours verdoyantes sont recouvertes d’un limon, véritable engrais, apporté des plaines équatoriales du continent, par le plus grand fleuve du monde, long de six à huit mille kilomètres, débordant chaque année, avec une précision mathématique. Cette terre fortunée est entourée d’une large ceinture de déserts formés quelquefois de sables d’un jaune d’or, souvent par des rochers calcaires ou des grès recouverts d’une couche épaisse de rognons de silex, teints en violet foncé par des oxydes de manganèse. La vallée, partout très bien arrosée, est verte comme la Hollande, et les récoltes abondantes : cannes à sucre, coton, doura, maïs, blé, orges, trèfles, etc., s’y succèdent sans interruption.

C’est dans cette région, certainement unique au monde, que naquit, à une époque très reculée, la race égyptienne, agricole avant tout, d’une intelligence hors ligne et douée d’un génie créateur en toutes choses. Elle sut bientôt trouver, par son talent d’observation et son esprit patient, la solution des problèmes scientifiques de premier ordre qui préoccupaient alors le monde antique. Elle a édifié avec un art incomparable ces monumens majestueux, temples et tombeaux qui, après tant de siècles écoulés, s’élèvent encore fièrement à la surface du sol, ou ceux plus grandioses encore qui ont été creusés dans les rochers, décorés avec une patience sans nom et qu’on ne peut admirer qu’en pénétrant profondément dans le flanc des montagnes.

Ce sont ces hommes, déjà doués d’une conscience vraiment moderne qui, les premiers sur la terre, au milieu d’un monde encore barbare, ont trouvé et enseigné les admirables préceptes d’une morale qui régit encore de nos jours la vie des peuples civilisés. Ils ont été des astronomes et des artistes de premier ordre, des agriculteurs et des ingénieurs singulièrement habiles dans l’art des irrigations, de savans architectes, des philosophes et des penseurs profonds.

Il n’est donc pas indifférent de rechercher pourquoi, après