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La bataille de Firozochabar coûta cher aux Anglais et aurait pu être désastreuse pour eux sans l’inaction inexplicable d’une partie de l’armée ennemie, commandée par Gulab-Singh, le conquérant du Thibet occidental. La bonne volonté de ce dernier en faveur des Anglais se manifesta encore après la journée décisive de Sobraon (février 1845), qui ouvrit à l’armée de sir Hugb Gough le chemin de Lahore. Gulab-Singh alors prit une part active et prépondérante aux négociations pour la paix, les mena à l’entière satisfaction des Anglais, et en fut magnifiquement récompensé.

Par le traité de Lahore du 9 mars 1846, l’Empire sikh fut démembré. Une partie comprenant le Pendjab et le Moultan fut laissée au roi alors régnant et forma le royaume de Lahore qui fut placé sous la tutelle britannique, l’autre partie forma un État distinct et autonome, le Cachemire, dont la souveraineté fut confiée à Gulab-Singh, « en considération, disait le traité, des services qu’il venait de rendre à l’État de Lahore, en rétablissant les relations de bonne amitié entre cet État et le gouvernement britannique. » Un traité séparé, signé à Amritsar, fixa la composition et les limites du nouvel État et les obligations imposées au nouveau souverain. Il y fut stipulé que les limites des territoires cédés à Gulab-Singh ne pourraient jamais être modifiées sans l’agrément du gouvernement britannique ; que le souverain cachemirien s’en rapporterait à l’arbitrage de l’Angleterre pour toutes les difficultés qui pourraient surgir entre lui et le roi de Lahore, ou d’autres États limitrophes ; qu’il s’engageait, pour lui-même et ses héritiers, à se joindre, avec toutes ses forces militaires, aux troupes britanniques opérant sur les territoires confinant à ses possessions, et à ne prendre aucun Européen ni Américain à son service, sans l’agrément de l’Angleterre, enfin il se reconnaissait vassal du gouvernement britannique, et il s’engageait à lui faire hommage, chaque année, d’un cheval, de six châles de Cachemire, de six boucs et d’autant de chèvres. En revanche le gouvernement promettait à Gulab-Singh son aide et sa protection contre les ennemis extérieurs qui envahiraient son territoire.

Le nouvel État de Cachemire comprit non seulement l’ancienne province de Cachemire, mais encore le Petit Thibet et le Moyen Thibet, les conquêtes récentes de Gulah-Singh. Désignées sous le nom de Outlyings (dépendances lointaines), ces