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Dans le premier de ces pavillons, proche Westminster Bridge, sont établis les bureaux de l’hôpital : Counting-House. De grandes salles, un nombre respectable d’employés, comme dans tous les établissemens londoniens. Il semble que le fonctionnarisme dont sont affligées en France nos institutions d’Etat règne en maître dans les œuvres privées d’outre-Manche. Les frais généraux sont énormes. Scribes, secrétaires et commis, un monde s’agite et n’a pas trop de loisirs, tant les formalités administratives sont minutieuses et exigeantes. Circulaires et brochures abondent. Le secrétaire-surintendant, fort complaisamment, répond à mes questions à propos des nurses et me prépare un petit ballot de documens imprimés. Le sujet m’intéresse au plus haut point ici où miss Nightingale a fondé sa première école d’infirmières.

On sait qu’à miss Nightingale est due la rénovation du personnel hospitalier en Angleterre. Jusqu’à l’époque, encore peu éloignée, où, très jeune fille de très bonne famille, miss Nightingale voua sa vie au soin des malades pauvres dans les hôpitaux, les gardes-malades au milieu desquelles elle allait prendre sa part de travail s’étaient recrutées parmi les plus misérables des femmes. Pauvresses rebutées de partout, transfuges du workhouse, ivrognesses notoires ou femmes de mauvaise vie, telles étaient les recrues qui peuplaient, en 1860, les hôpitaux anglais. Et voici que, peu à peu, sous l’effort et l’exemple d’une seule femme de cœur, d’abord incomprise et blâmée, puis imitée et portée aux nues, cette lie s’est épurée jusqu’à expulser tout déchet, et le niveau moral des infirmières anglaises s’est établi partout.

Aujourd’hui, c’est une institution vénérée, presque un sacerdoce féminin que ces nurses, et les candidates à cette carrière de dévouement sont en si grand nombre qu’il faut mettre des barrières à leur empressement. Ainsi les grands hôpitaux ne veulent plus accepter de jeunes filles au-dessous de vingt-trois ans, et c’est un véritable questionnaire d’inquisition auquel doivent satisfaire les aspirantes. Voici le modèle d’une de ces enquêtes :

Questions auxquelles doit répondre la candidate :

1° Nom et prénoms, adresse actuelle et adresse de la famille si elle est différente.

2° Êtes-vous célibataire ou veuve ?

3° Votre occupation ou situation actuelle et, si vous êtes veuve, la profession de votre maxi ?