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produit récemment à plusieurs reprises, la police a mis en campagne un détective, sans succès jusqu’ici.

C’est dans ce district que travaillent sœur Catherine et ses aides. Elles sont nombreuses, une centaine : plusieurs étudient le métier, soit de sage-femme, soit d’infirmière à domicile, les autres soignent les malheureux des environs. Une maison reçoit quatorze malades et quelques enfans, facilitant ainsi les études des élèves sages-femmes. 893 d’entre elles ont reçu depuis la fondation le diplôme de la L. O. S (London Obstetrical Society), qui leur donne le droit d’exercer la profession.

Le soleil, déjà haut à l’horizon, darde implacablement lorsque je prends, au sortir de la gare de Plaistow, la route bordée d’habitations modestes qui conduit à la maison des gardes-malades. « Nurses-home, » pas d’autre dénomination. Sœur Catherine me reçoit, cordiale et douce, et, après quelques instans de conversation, elle me confie à l’une des sœurs visiteuses des malades. Nous parcourons l’hôpital minuscule et la maison annexe où des petits enfans servent de leçons de choses aux futures praticiennes. Et puis, nous allons, d’un pas rapide qu’elle prend naturellement, vers les cottages où l’attendent ses pauvres. Chemin faisant, sous l’ardent soleil, je la questionne un peu. Elle est jeune, la petite sœur, et gaie. Elle semble heureuse de tout, et de ses longs mois de fatigant labeur, et des trente jours de congé qu’elle prendra pour aller, encore cette année, explorer l’Irlande, ignorée et si pittoresque, me dit-elle. Et nous rencontrons, au pied de l’escalier qui descend de la gare, une de ses compagnes, occupée à remonter sur sa bicyclette. Le costume sévère et le petit chapeau s’accommodent fort bien de la machine et nous voyons disparaître la pittoresque silhouette.

Ma petite cicerone préfère marcher. Et chaque matin elle va, comme aujourd’hui, munie de sa liste de noms, chargée de son sac d’infirmière, de porte en porte, soulevant les marteaux qui tiennent lieu de sonnettes. On vient ouvrir, ou bien on ne vient pas. Alors, c’est à la voisine qu’il faut demander la clé, pour pénétrer auprès de la malade clouée sur son lit. C’est le cas ici, chez une malheureuse, alcoolique invétérée, et qui se meurt, au dernier période de l’usure organique causée par l’alcool. Elle est là, gémissante, inerte comme une bûche posée sur des chenets. Nous refaisons son lit, puis sa toilette, et lui donnons les soins nécessaires. La vieille n’a plus guère que l’usage de sa