les instituteurs ses subordonnés concertèrent une revanche. Discrètement ou publiquement embrigadées dans les organisations socialistes, les Amicales savent donner des leçons au ministre : l’impunité est d’avance assurée. Dans Lot-et-Garonne, le département de M. Chaumié, l’Amicale, tout de suite, inscrivit parmi les livres classiques le manuel d’histoire de MM. Hervé et Clémendot. La Revue de l’Enseignement primaire signifia au ministre que les éducateurs de France ne le considéraient plus comme leur chef, et qu’il y aurait bientôt, parmi eux, quatre-vingt mille instituteurs socialistes. Le grand maître de l’Université était moralement déposé par les primaires !
Ils avaient plus de prise sur M. Comte, leur représentant au Conseil supérieur. Quinze jours après le discours de M. Chaumié, le mandat de M. Comte devait être renouvelé ; le fondateur de l’Union des instituteurs laïques patriotes n’obtint que 388 voix sur 1 300 suffrages. M. Comte était évincé par l’élite de notre enseignement primaire. Les élections au conseil départemental de la Seine confirmèrent ce verdict, on élut, à la presque-unanimité, un instituteur qui avait exprimé le souhait « de voir partout le livre de M. Hervé : à l’école, à la bibliothèque, dans tous les foyers. » Le corps électoral des instituteurs parisiens ripostait à M. Chaumié.
Deux congrès, dont l’infortuné ministre n’avait pas le droit de négliger les avis, accentuèrent encore les représailles du pacifisme. Le parti socialiste proclama dans ses assises que l’enseignement patriotique devait être exclu de l’école comme n’étant pas susceptible de démonstration : l’on demandait à la patrie ses titres à être aimée, peu s’en fallait qu’on ne l’interrogeât sur son droit à exister. La Ligue de l’Enseignement, à son tour, manifesta. Nous avons dit ici même la puissance de cette organisation : depuis longtemps, elle se flatte de suggérer aux ministres successifs de l’Instruction publique les réformes nécessaires ; appuyée par la maçonnerie dont elle se pique d’être la « fille, » elle sait imposer ce qu’elle suggère. Elle a pour président, aujourd’hui, M. Buisson. Au moment où sans doute M. Chaumié s’inquiétait, entre intimes, de l’esprit de nos instituteurs, la Ligue les rassemblait à Amiens pour une manifestation de pacifisme.
« Pour la patrie, par le livre et par l’épée, » telle était l’ancienne formule qui figurait en vignette sur le papier de la Ligue. Jean Macé, l’humanitaire impénitent, avait cru bon, jadis, de