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et le sixième du rendement total. Le minerai de fer oolithique (calcaire) vaut trois francs par tonne en moyenne. L’extraction de ce minerai donne au minimum 50 centimes de bénéfice. Les 2 200 millions de tonnes correspondant aux 43 000 hectares des gisemens lorrains annexés représentent donc un bénéfice de 1 milliard et 100 millions ; la partie rétrocédée par échange ne figure dans ce chiffre que pour 200 millions de francs. De tels résultats étaient-ils de ceux dont il y avait lieu de s’alarmer au point de sacrifier Belfort pour les conjurer ?

Les notables métallurgistes auxquels nous devons les renseignemens précédens reconnaissent que la rétrocession des 10 000 hectares de terrain en Lorraine, en procurant à l’Allemagne une plus grande quantité de minerai de fer, a contribué à l’accroissement de sa métallurgie, mais, en même temps, ils font remarquer que, même s’il y avait eu refus de la part de la France de se prêter à l’échange, la métallurgie allemande n’en aurait pas moins pris un grand essor. Dans ce cas, si les Allemands avaient eu besoin de nos minerais, ils nous en auraient acheté ; en raison des avantages qu’ils retirent du prix et de la bonne qualité de leur houille, ils n’auraient fait qu’un sacrifice insignifiant en donnant aux détenteurs français un bénéfice de 50 centimes par tonne.

La véritable cause de l’extension de la métallurgie allemande, devenue une des plus puissantes du monde entier, est due en grande partie aux ressources de l’Allemagne en houille. Elle possède des bassins de ce combustible en Silésie, en Westphalie et dans la région de Saarbrück, c’est-à-dire, d’après une statistique récente, autant que l’Angleterre et les États-Unis à eux deux. Le bassin de Silésie est le plus riche qui existe et celui de Westphalie est presque aussi important. A la vérité, la cession à l’Allemagne en 1871 des terrains houillers prolongeant le bassin de Saarbrück, a ajouté à la richesse industrielle de ce pays dans une certaine mesure, mais cette cession ayant été stipulée d’une manière définitive par le traité de paix du 10 mai, n’est pas en cause ici[1].

  1. Les industriels de l’Est se sont demandé si l’on ne pourrait rencontrer, en Meurthe-et-Moselle, le prolongement du bassin houiller de Saarbrück. Des sociétés de recherches ont été constituées en 1903 ; des sondages ont été effectués ; on n’a trouvé jusqu’ici, à 700 et 800 mètres de profondeur, que des veines de houille, entre la frontière et Pont-à-Mousson. En tout cas, si les travaux entrepris aboutissent à un résultat favorable, il est peu probable que la production du bassin prolongé soit suffisante pour réparer la perte causée par la cession du prolongement du bassin de Saarbrück dans l’ancien département de la Moselle.