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heureuses ont complètement modifié à notre avantage la situation à ce point de vue.


Bien que le colonel Laussedat se défende, dans un passage de son livre, d’avoir envisagé Belfort comme devant jouer à l’avenir un rôle purement défensif, la plupart des considérations qu’il expose tendent à prouver que cette opinion était bien près d’être la sienne. La conviction qu’il avait que les Allemands n’attachaient aucun prix à la possession de Belfort et sa résignation à accepter le rayon de 7 kilomètres autour de la place, sont significatives à cet égard.

Il est curieux que, de leur côté, les Allemands, en 1871, se soient décidés, sans mesurer la portée de cette concession, à restituer Belfort avec une zone autour de la place suffisante pour nous permettre d’étendre ses ouvrages et de faire mouvoir à peu près à l’aise les troupes qui l’occupent. Si, cependant, il en a été ainsi, les dispositions qu’ils ont prises depuis, et celles qu’ils préparent au point de vue militaire dans la partie méridionale de la Haute-Alsace et sur le Rhin, donnent, comme nous allons le montrer, un singulier démenti à leur ancienne manière de voir.

En 1871, il n’existait aucun pont fixe sur le Rhin de Strasbourg (Kehl) à Bâle. On en compte trois, aujourd’hui, entre Neuf-Brisach et la frontière suisse vers Bâle : ceux de Neuf-Brisach-Vieux-Brisach[1], Chalampé-Neuenburg et Saint-Louis-Leopoldshœhe.

Sur la rive droite du fleuve (rive badoise), les Allemands ont commencé la construction d’une ligne de défense s’étendant sur 30 à 32 kilomètres, à partir de Mülheim, en face du point de passage de Chalampé, jusqu’à la frontière suisse dans le voisinage du point de passage de Saint-Louis. Entre ces deux points, cette ligne fortifiée n’est encore représentée effectivement que par des ouvrages élevés à Istein ; elle doit être complétée par d’autres qui auront pour emplacemens : le Hachberg près de Mülheim, les hauteurs de Bellingen (entre Mûlheim et Istein) et celles de Tüllingen près de la frontière suisse (canton de Bâle) ; elle sera rattachée plus tard à l’organisation défensive de Neuf-Brisach et de ses abords.

Le nom d’Istein, que nous venons de prononcer, est celui

  1. On traversait le Rhin, entre Neuf et Vieux-Brisach, sur un pont de bateaux.