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famille, et qui mérite à tous égards que l’on s’intéresse à elle.

M. de Senfft s’est chargé de faire parvenir votre intéressante lettre à M. de R… Il n’y a point de difficulté que vous fassiez ce qui avait été convenu avec lui par rapport à M. d’O…

Je n’ai pas encore reçu les ouvrages que vous m’annoncez. Ils doivent être entre les mains de M. Breluque[1] à qui M. le comte de Senfft doit les demander. Je vous remercie de me tenir instruit de ce qui se passe dans votre pays. Comme j’ai cessé depuis plusieurs mois d’écrire dans les journaux, je ne sais pas bien ce que le Défenseur va devenir. Je crois cependant qu’on a un projet qui pourrait rendre ce recueil utile, autant qu’un journal peut l’être en ce moment. Peut-être pourriez-vous en essayer encore pendant un trimestre.

Je suis flatté que ma Défense[2] ait votre approbation. L’archevêque de Gênes m’a écrit qu’il en était très satisfait[3]. Avant même qu’elle parût, il s’était déclaré en faveur de la doctrine exposée dans mon deuxième volume. Je vais incessamment commencer le troisième. Il me faudra un an de travail pour l’achever[4].

Malgré la loi sur les évêchés, c’est à peine si on a l’espoir qu’on en érige cinq ou six cette année. Jugez par là de l’esprit de notre ministère, et de la bonhomie des royalistes qui se sont faits ses appuis. Mais il faut que la volonté de Dieu s’accomplisse, et que l’Europe soit punie. Tout se prépare pour des événemens très imprévus, quoiqu’ils soient prédits. Il n’y a plus de société possible, et nous assistons chaque jour à l’agonie du genre humain ; j’en suis chaque jour plus convaincu.

Donnez-moi de vos nouvelles, Monsieur et respectable ami, et croyez à mon tendre et respectueux attachement.

F. DE LA MENNAIS.

  1. L’abbé Breluque était un ancien directeur du séminaire de Besançon. Son dévouement à la cause « du trône et de l’autel » ne recula jamais, au dire de ses adversaires, devant aucune intrigue. Il avait joué un rôle actif pendant l’émigration.
  2. La Défense de l’Essai sur l’indifférence. Voyez dans l’appendice du livre de M. Boutard les trois Approbations (texte et traduction) données pour la Défense par des théologiens romains : le texte italien avait déjà été publié par M. l’abbé Roussel dans son Lamennais (t. I, p. 158-160).
  3. Voyez, dans Blaize, t. I, p. 405, la lettre que Lamennais écrivit à l’archevêque, sous la date du 8 novembre 1821.
  4. Le troisième volume de l’Essai n’a paru qu’en 1823.