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démodée, routinière, condamnée à disparaître promptement. Comment donc se fait-il que le peuple le plus disposé à substituer les méthodes nouvelles aux méthodes anciennes, venant à se préoccuper du relèvement de sa marine marchande, songe à favoriser ainsi les voiliers ? C’est sans doute qu’il croit avantageux d’appliquer, dans certains cas, un mode de propulsion moins coûteux et moins rapide à un navire moderne en acier. Des témoignages nombreux et très précis ont été recueillis par la Commission sur ce point. Sur la côte du Pacifique, dans les ports du Puget Sound comme à San Francisco, un vapeur ne prend qu’exceptionnellement les grains, les farines et les bois qui forment la masse des exportations américaines de cette région. Au cours de l’année 1903, on ne relève que 44 navires à vapeur ayant chargé ces marchandises dans les ports américains du Pacifique ; ils avaient enlevé seulement 207 708 tonnes. Pendant cette même période, 600 voiliers avaient enlevé plus de 1 600 000 tonnes[1]. Il est clair que la concurrence des voiliers étrangers ne serait pas découragée sur les côtes du Pacifique par la mise en service de vapeurs américains. Il faut des voiliers américains pour lutter avec les voiliers anglais, allemands, norvégiens et français.

Il en faut encore pour former, des officiers et des équipages américains. Tous les témoignages s’accordent pour reconnaître leur utilité à ce point de vue. La Commission a très bien résumé, d’ailleurs, les motifs qui l’ont déterminée à ne faire aucune distinction entre les vapeurs et les voiliers. Voici le passage principal de son rapport relatif à cette question[2].

« Il est à noter qu’un seul taux de prime de cinq dollars par tonne de jauge brute est prévu pour tous les navires, y compris les voiliers. C’était le meilleur plan à adopter : il est simple et intelligible ; il ne laisse place à aucune accusation de favoritisme. De plus, il y a de sérieux motifs d’accorder le même traitement aux voiliers et aux vapeurs. Ce sont les transporteurs les plus économiques pour des cargaisons importantes et leur présence joue partout un rôle modérateur vis-à-vis des taux de fret exigés par les vapeurs. Mais, par-dessus tout, les voiliers square rigged sont une école indispensable pour les marins. On sait que les plus grandes compagnies de navigation à vapeur

  1. Hearings, t. II, p. 1026.
  2. Report, p. 22.