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ainsi, pour lui complaire, le gouvernail fut placé en plein air, au lieu de conserver l’abri du pont blindé.

Un changement de ministre se produisit, sur ces entrefaites, mais n’arrêta rien. L’amiral Fauque de Jonquières qui, treize ans auparavant, avait, comme rapporteur au Conseil des travaux, fait approuver mon projet de ventilation du transport Calvados, présenta à la signature du ministre Gougeard les plans du navire modifiés suivant les décisions antérieures. L’ordre de mise en chantier fut envoyé à Brest ; le nouveau croiseur prit dans le budget la place du Capitaine-Lucas, mais il reçut le nom de Sfax.

L’auteur des plans des navires doit, de toute nécessité, avoir autorité sur les chantiers et action directe sur le personnel d’exécution. Dans le cas du Sfax, je dirigeai moi-même la construction, ce qui était particulièrement heureux. Le ministre, tiraillé sans doute au dernier moment par des influences contraires, n’avait signé que l’ordre de construire, et non les plans les plus importans. La décision, indéniable au fond, était imparfaitement exprimée ; c’était un vice de forme, pouvant entraîner de nouveaux retards et peut-être l’arrêt final, sur lequel j’ai eu soin de rester muet en 1882. Le Sfax a été mis à l’eau, une année environ après l’arrivée des fers de membrure sur sa cale ; c’était le début de l’arsenal de Brest, dans un genre de sport où il s’est surpassé depuis lors,

La description du système défensif de notre premier bâtiment à flottaison cellulaire a été donnée à l’occasion des projets de 1872-73. J’ajouterai seulement qu’au point de vue de l’installation du cofferdam et de son drainage, de la protection des écoutilles par des glacis très préférables aux surbaux et par des cofferdams munis eux-mêmes de drains, etc., tous les détails du Sfax ont été étudiés avec une minutie peut-être excessive, qui ne s’est répétée pour aucun autre navire. La hauteur de la tranche cellulaire et la distribution des cloisons avaient été déterminées à l’aide de calculs rudimentaires ; l’efficacité de la protection qu’elles assuraient à la stabilité n’a été exactement établie que dix ans plus tard, et elle a été reconnue satisfaisante.

Deux séries de projets dérivant directement du Sfax ont ensuite été étudiées, l’une pour la France, l’autre pour le Japon, et ont eu des destinées différentes.

Il n’y a qu’un mot à dire de la série française. Elle portait sur un Sfax agrandi qui me fut demandé vers 1883 et qui, sous