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Le thème de cette danse est donc le larcin d’un baiser (robardie serait-il un dérivé de rober, « enlever par larcin ? « ). C’est, on le voit, une simple pantomime sans paroles. Aussi est-elle exécutée, à ce qu’il semble, non par des seigneurs, mais par des jongleurs, ou plutôt par des jongleresses : car l’auteur des Tournois nous apprend que le prétendu danseur qui faisait « la danse robardoise » et qui ravissait le baiser était un travesti : une jeune fille nommée Johannette de Boinville.


7. BELE AELIS

Le couplet de Bele Aelis pose un petit problème singulier. C’est un thème de danse qui a fait fureur au XIIIe siècle, car il reparaît sous une vingtaine de formes[1] dans notre collection, pourtant si pauvre, de chansons à danser :


Bele Aaliz main se leva,
Bel se vesti, mieus se para,
Lava ses ueuz, son vis lava,
En un jardin si s’en entra[2]...


et l’on voit ces quelques vers, indéfiniment repris et modifiés, s’insérer dans des couplets où, semble-t-il, ils n’ont que faire :


Vos n’alez pas
Si com je faz.
— Ne vos n’i savez aler.
Bele Aaliz par main se leva.
Vos n’alez pas —
Mieus se vesti, se para.
Bon jor ait celé que n’os nommer !
Sovent m’i fait soupirer.
Vos n’alez pas
Si com je faz.
— Ne vos n’i savez aler.


Que se passait-il dans ce jardin où entre Bele Aelis ? Aucun texte ne nous le dit. Ceux qui font le plus avancer le récit ajoutent qu’elle y trouva « cinq fleurettes de rose fleurie » et

  1. G. Paris leur a consacré un mémoire spécial intitulé Bele Aaliz, qui a paru dans les Mélanges de philologie romane dédiés à C. Wahlund, Màcon, 1896, p. 1-12.
  2. Motets, II, p. 103.