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Henri III et Henri IV avaient successivement emprunte au duc Frédéric de Wurtemberg, pour leurs besoins, dans les temps troublés, différentes sommes s’élevant au total de 301 849 écus, 37 sols, 12 deniers, quelques-unes de ces sommes aux taux de 5 p. 100, d’autres à 7 1/3 p. 100. Henri IV avait tâché de rembourser petit à petit cette dette à partir de 1600, puis, découragé du chiffre trop élevé, avait proposé au duc, afin de le dédommager, de lui abandonner « par forme d’engagement et à la faculté de rachat perpétuel, les domaines, château, terre et seigneuries d’Alençon, Valognes, Saint-Sauveur-Lendelin, Saint-Sauveur-le-Vicomte et Néhou ». Le duc allemand avait accepté. Par la suite, ces possessions, si éloignées, n’avaient été pour lui qu’un embarras et un ennui : la gestion se faisait mal ; les difficultés étaient innombrables. Apprenant vers 1612 que Marie de Médicis achetait des domaines, il lui offrit de lui revendre tout ce qu’il possédait en Basse-Normandie : les plus grandes facilités de paiement seraient accordées, disait-il, la reine paierait par l’intermédiaire de la banque internationale de Lumagne et Sainctot, lesquels verseraient le prix convenu au duc, à la foire de Francfort-sur-le-Mein. M. d’Attichy et la confidente de la reine, Léonora Galigaï, poussèrent vivement la régente à accepter. Au printemps de 1612 l’affaire était conclue et le prix arrête à 200 000 écus, c’est-à-dire 600 000 livres, le premier versement devant être effectué à la foire suivante de Pâques, à Francfort, Au moment de la foire indiquée, Marie de Médicis n’avait pas l’argent. Très anxieuse de l’histoire dans laquelle elle s’était engagée, et désirant vivement « se voir hors de cette affaire, » elle expédia à Francfort M. de Courson, avec charge d’expliquer le retard involontaire du paiement ; elle protestait vouloir tenir tous ses engagemens ; elle suppliait le duc de l’aider ce en s’accommodant aux termes et lieux de paiement ainsi qu’aux sûretés que ledit Courson vous en propose. » L’échéance fut renvoyée à la foire suivante. A la foire suivante M. de Courson fit de nouveau le voyage en venant expliquer que Marie de Médicis possédait bien la somme disponible, mais que les banquiers Lumagne et Sainctot n’avaient pu la transporter ; il ajoutait qu’à la foire qui viendrait elle expédierait exactement le premier tiers de la dette ; que les deux autres tiers seraient échelonnés aux foires de Pâques et de septembre de l’année suivante ; que si le duc y tenait, les banquiers avanceraient des lettres de change, portant intérêt « au denier vingt, » ce qui permettrait de les négocier avec des